>Histoire

4 / 03 / 2023

L’extrême droite.

 Pétain, « ce grand soldat » ; Maurras, « ce grand écrivain », auteur de la formule, « Vichy, cette divine surprise » ;  Ricoeur, « ce grand philosophe » … collaborateur de la feuille pétainiste, « l’unité française », converti à « gauche » après-guerre, le « philosophe » termine sa longue carrière en tant que « conseiller » de Rocard et signe une pétition en défense du plan Notat (CFDT) Juppé en 1995.

Pétain, Maurras, Ricoeur, … on pourrait ajouter les prêtres jésuites ou dominicains, « formateurs » à l’école d’Uriage …

Le président Macron a des convictions. Oui, mais nous aussi. A l’extrême opposé.

Les « progressistes », les « anti populistes » de notre temps ne manquent pas d’audace. Ils affichent la couleur, fièrement. L’extrême droite, avec ou sans guillemets est à l’honneur ; ce qui ne semble guère déranger les pourfendeurs professionnels de l’extrême droite, en gants de soie roses ou verts ou roses et verts. Pourquoi ? La question mérite d’être posée. Voici quelques éléments de réponses possibles qui méritent au moins d’être discutés.

Depuis longtemps, la mise au premier plan du « danger de l’extrême droite » sert en réalité à tenter de masquer l’acceptation des contre-réformes les plus brutales. On connait la rengaine : il faudrait tout accepter, même les « réformes » les plus désagréables, « pour ne pas faire le jeu … » Ainsi, il aurait fallu voter à marche forcée l’intégralité de la contre-réforme des retraites, y compris son article 7 … pour bloquer l’extrême droite. Peut-on faire plus absurde ? Pour beaucoup de travailleurs, le vote à l’assemblée de l’article 7 aurait signifié : « c’est fichu, à quoi bon faire grève … ».

Encore que, nos redoutables pourfendeurs d’ « extrême droite » n’hésitent pas, le cas échéant, à toutes les compromissions ; par exemple, un certain 21 mai 2021. En présence du ministre de l’intérieur et de dignitaires de la droite extrême et des syndicats de policiers – certains affichant des ambitieux factieuses – le candidat présidentiel des jours heureux s’affiche au premier rang, tout sourire … certes, il n’est pas le seul.

La macronie l’a récompensé pour son dévouement par un prix : « la révélation politique de l’année 2022 » (1) pour le plus grand plaisir de l’éditocrate en service commandé ce jour-là, l’incomparable Christophe Barbier. (Reconverti dans le théâtre. Mais lequel ? Comique, tragique, tragi-comique ?). Roussel était déjà titulaire du 1er prix de « l’humour politique ». L’humour noir …

Rappelons que le 21 juin 2022, Roussel était l’invité de marque du jupitérien-président pour examiner les conditions d’une entrée des « communistes » dans un gouvernement d’unité nationale.

A quel poste ? On ne sait pas. Peut-être ministre de la guerre ?

On imagine bien que nombre de syndicalistes ont suivi l’affaire avec intérêt et quelques sueurs froides à la clé. « Tout dépend du projet » avait précisé Roussel sur la chaîne de Bolloré, CNews. C’est toujours sur CNews (qui sponsorisait aussi le xénophobe et raciste Zemmour) que Roussel indique que  finalement, il n’y aura pas de ministre « communiste ». Dans un article intitulé « rétropédalage », le journal Marianne rappelait opportunément que Roussel « n’a eu de cesse d’entretenir le flou quant à une éventuelle participation du PCF » à un gouvernement d’union nationale. On n’a pas oublié la suite. Tout ceci a eu quelques conséquences (et ce n’est pas fini) dans la CGT …

Le dilemme : le PCF plus utile dedans que dehors pour assurer la stabilité des institutions a été tranché. Mais par qui, finalement ?

(Pour la petite histoire, c’est encore une journaliste de CNews, Sonia Mabrouk qui remet au candidat « communiste » à la présidentielle » le prix de la « révélation politique … » tant convoité. Un spectacle étonnant que l’on peut retrouver sur la chaîne PUBLIC-SENAT).

« Les ligues factieuses » dans l’ombre ?

Une vieille histoire.

Nous sommes en France, en 1935. Le gouvernement adopte la politique anti ouvrière de Pierre Laval.

La riposte ouvrière qui devrait s’organiser au plan national et interprofessionnel tarde quelque peu à s’organiser. C’est le moins que l’on puisse dire.

Les travailleurs ne veulent pas subir une politique qui les voue à la misère. Ils ne sont pas responsables de la crise du capitalisme commencée aux EU en 1929.

Des émeutes éclatent, au Havre, à Brest, à Toulon et à Limoges. L’Etat au service de la classe dirigeante réprime. Gendarmes, gardes mobiles et même un régiment d’infanterie coloniale sont mobilisés. C’est la guerre des classes. Il y a des morts et des centaines de blessés.

6 août 1935 à Toulon.

Les ouvriers en grève se heurtent à un autre adversaire qui lui, « joue contre son camp ».

Les dirigeants du PCF dénoncent les manifestants et les grévistes accusés de faire le « jeu de l’extrême droite ». Il aurait fallu se taire, se soumettre et attendre … mais attendre quoi ?

A lire les commentaires de la presse ouvrière de l’époque – l’Humanité pour le PCF, le Populaire pour la SFIO – on voit bien que le principal souci de ses publications, consiste, par la méthode de l’amalgame, à suggérer, et parfois un peu plus, que les « émeutes » sont le résultat de provocations d’ « extrême droite ».

Pour tenir la classe ouvrière en laisse et la soumettre à la stratégie d’alliance avec le parti radical, il faut faire peur : « taisez-vous, obéissez », ne « provoquez pas » les ligues factieuses qui n’attendent que « des prétextes pour tenter un coup de force » ; les stratèges de la « gauche unie » s’occupent de tout. Il faudrait accepter les baisses de salaire de 10% ! « Ayez confiance en vos chefs » disent-ils.

Un simple piquet de grève, c’est déjà trop pour les chefs auto proclamés du mouvement ouvrier. Alors des comités de grève pour coordonner l’action ouvrière, établir le rapport des forces et gagner, n’en parlons même pas.

Le stalinien Duclos résume toute la politique de l’appareil : « nous attachons un trop grand prix à notre collaboration avec le parti radical pour ne pas nous dresser contre les provocateurs ».

Pour parvenir à ses fins, la « gauche » a besoin d’agiter en permanence l’épouvantail de « l’extrême droite » qui évidemment s’en arrange très bien.

Les uns ont besoin des autres pour prospérer et tromper leur monde.

Dans ce contexte pour le moins tendu, on n’est pas surpris de voir la CGT hésiter, c’est un euphémisme, à organiser le combat pour les revendications.

L’extrême droite, le carburant de la « gauche » unie.

Par des confidences savamment distillées, le patron des Croix de Feu puis du PSF, le colonel de la Rocque en qui les chefs staliniens feignent de voir le prototype même du fascisme, – mouvement constitué pour l’essentiel d’anciens combattants de la 1ère « der des ders » – mouvement qui n’a pas grand-chose de commun avec le parti fasciste de Mussolini, le Duce que toute la presse dite « démocratique » et clérticale applaudit d’ailleurs encore en 1935, (voir : http://force-ouvriere44.fr/le-bal-des-domestiques/ ) laisse planer la menace d’un coup d’état (2). De la Rocque laisse filtrer des « informations » prétendument ultra confidentielles communiquées à ses chefs de section :

Le 7 juillet 1935 : « Demain, après-demain, dans 15 jours, je peux vous donner l’ordre de mobilisation, contre la révolution de monsieur Blum SFIO, socialiste), Daladier (parti radical) Cachin (PCF) et consorts ».

Le 14 octobre 1935 : « L’heure approche. Vos camarades dans leurs départements guettent votre signal ».

La farce se poursuit le 5 novembre 1935 : « Les consignes sont passées, les chefs sont alertés … »

La menace pouvait sembler bien réelle. Les émeutes du 4 février 1934 avaient provoqué sous la pression « populaire » un rapprochement des « gauches », PCF et SFIO, d’une part, de la CGT-U et de la CGT d’autre part et jeté les bases du bloc avec le parti radical, bloc constitué sur les bases politiques du parti radical de Daladier (en particulier la défense de l’ « Empire », c’est-à-dire le pillage des colonies et de ses 100 millions de « sujets) ; Daladier le « révolutionnaire … », Blum et le sinistre Cachin, révolutionnaires ? Le « fasciste » La Rocque y allait un peu fort

L’enfumage était complet.

En 1935, les partisans de l’ « ordre » et de la bienséance aurait pu attribuer le prix de « la révélation politique de l’année » s’il avait existé, collectivement à Thorez, Duclos, Vaillant-Couturier … pour ne pas faire de jaloux.

Notons surtout que si les partisans de la « stabilité » et des « réformes » présentées comme « indispensables » à l’époqueil convenait paraît-il, d’assainir les comptes de la nation – ont leur état-major : le parti radical, les partis de droite classique et ceux de la droite de la droite, la classe exploitée non seulement n’a pas « son » état-major mais doit de surcroit déjouer les manœuvres de division et les provocations des chefs de l’appareil stalinien.

Le Front populaire aux affaires.

Après le succès électoral du Front populaire, le colonel « fasciste » de La Rocque déclare : « nos idées sont au pouvoir » … mais « pas nos hommes. Bientôt nos idées elles-mêmes se chargeront de choisir nos hommes ».

Il cherche à constituer des « syndicats » d’entreprises comme le ferait un pionnier de l’autogestion (3). Il se déclare partisan d’une meilleure répartition des richesses (en application stricte des recommandations des encycliques « sociales »).

Ne voulant pas et ne pouvant pas se joindre aux grévistes de mai-juin 36, La Rocque organise des « déambulations » qu’il veut « silencieuses ». C’est que le colonel est un partisan convaincu de l’ « ordre » et de la « stabilité » des institutions. C’est la Providence qui l’exige. Le colonel est très croyant, ce qui est son droit ; il est surtout partisan d’un cléricalisme style « vieille France », obscurantiste à souhait. Rien à voir avec  le vrai fascisme mussolinien.

Le jeu de dupes continue.

Pendant que côté pile, Maurice Thorez, multiplie les imprécations contre « l’extrême droite-fasciste », le PCF organise le retour en odeur de sainteté de Marcel Déat, chef historique de la tendance « néo socialiste » de la SFIO qui évolue à grands pas vers le fascisme authentique, avec une préférence affichée pour le « modèle » national-socialiste.

Déat avait été expulsé des rangs de la SFIO dès 1933. Son mot d’ordre central : « Ordre, Autorité, Nation » avait « épouvanté » Léon Blum. Mais les staliniens avaient besoin de Déat au Front populaire pour empêcher l’unité dans le combat de la classe ouvrière. Ils imposent le retour de Déat.

Ceux qui s’y opposent sont calomniés, traités de « provocateurs », de « cinquième colonne » ou de … fascistes. C’est le monde à l’envers.

Les trois leaders du Néo-socialisme fascisant éditent dès 1933 une brochure qui ne laisse planer aucun doute sur leurs choix politiques fascisants. En 1936, les chefs staliniens leur offre l’occasion de se fabriquer une virginité … bien au chaud au Front populaire. Les néos expliquaient : la lutte des classes, c’est fini, c’est ringard. C’était bon du temps de Karl Marx.

Comment ne pas voir que ce discours compte toujours de nombreux adeptes du côté notamment des « verdâtres » … inquiets le plus souvent pour l’avenir de notre « mère terre » ? il est vrai menacée par le capitalisme et ses conséquences dévastatrices au premier rang desquelles, toutes les guerres, « sans fin », que les pourfendeurs d’extrême droite soutiennent honteusement.

Ce sont bien une fois encore les dirigeants PCF qui se tournent vers le « néo syndicaliste » René Belin – qui sera l’homme clé de la Charte du travail de Vichy – pour convaincre les fonctionnaires CGT de ne pas rejoindre en mai 36 les ouvriers dans la lutte gréviste. Belin, discipliné, s’exécute.

Mais les provocations des chefs staliniens se heurtent à la mobilisation des travailleurs qui par la grève générale imposent des conquêtes essentielles aujourd’hui remises en cause.

Le colonel en pleine déambulation … silencieuse.

Dernier acte de la comédie.

A la fin de la guerre le fasciste Déat se réfugie en Allemagne à Sigmaringen où il retrouve son concurrent préféré, Jacques Doriot, ex N° 2 du PCF, plus nazi que les nazis.

Au même moment, de La Rocque est retenu prisonnier des nationaux-socialistes dans un camp nazi aux côtés de quelques dignitaires de la IIIème république et de Léon Jouhaux. De retour de captivité, il a tout juste le temps de passer ses dernières consignes politiques avant de quitter définitivement la scène (4). On peut les résumer ainsi :

« Puisque la collaboration des classes sous la forme de l’association Capital-Travail, c’est-à-dire le corporatisme, n’est passée ni par la droite, ni par l’extrême droite, il faut tenter l’expérience par la gauche ». (Plus tard, d’autres joueront la carte « d’extrême gauche »). Et il demande à ses partisans d’investir les différentes organisations qui se reconstituent en 1945, tout particulièrement la mouvance autour de Mitterrand-la-Francisque qui a entamé sa conversion à « gauche », mais sans négliger les milieux gaullistes ; l’essentiel étant de conserver intacte la doctrine corporatiste adaptée aux temps nouveaux. La plus grande souplesse étant recommandée pour y parvenir.

Un variant récent a été identifié.

On peut ne pas oublier que ce pauvre Thierry le Paon, éphémère secrétaire général de la CGT de mars 2013 à janvier 2015 a été expulsé de son poste (comme Déat l’avait été de la SFIO 80 ans plus tôt) après avoir donné une interview dans une feuille patronale confidentielle où il reprenait à son compte les thèses nauséabondes de « l’entreprise, communauté de destins » . Le Paon est passé dans les poubelles de l’Histoire. Mais ses « idées » fleurissent encore ici et là … notamment, ce n’est pas un hasard, chez certains pourfendeurs professionnels d’ « extrêmes droites ».

Le Paon aussi s’essayait aux diatribes anti « extrême droite » ; ça ne lui a pas bien réussi.

Comment peut-on en effet encore être dupes ? A moins peut-être, de le faire exprès.

En guise de conclusion :

Comme tous les partisans de l’association Capital-Travail, de La Rocque voyait dans l’entreprise une « communauté de destins », termes repris par nos « marcheurs », experts en start-up (5) du XXIème siècle, qui n’hésitent pas, on le voit, à recycler les pires vieilleries.

Il précisait qu’il faut tout faire pour « rendre l’ouvrier (on dit aujourd’hui : collaborateur) fidèle au sort de son entreprise ». Comment ? Non pas par la méthode du Front du travail national-socialiste – ça c’était la perspective de Déat (et de son compère Doriot), mais par « un droit de regard des ouvriers sur la gestion et l’association aux bénéfices », autrement dit, la sacro sainte « participation » et par l’ « intéressement » chers aux gaullistes dont la doctrine sociale est concentrée par ces quelques mots des mémoires politiques du général : « la doctrine sociale de Vichy n’était pas sans attraits … »

1- La « macronie » a ses zélés serviteurs. Sous l’ancien régime, les puissants, les monarques avaient leurs bouffons chargés, parfois à leurs dépens, de distraire la cour ; souvent des nains, bossus, difformes que leur « statut » rendait naturellement aigris. Etant les premiers informés de bien des secrets, Ils pouvaient participer aux intrigues de toutes sortes. Le romancier suédois Pär Lagerkvist a écrit un petit roman très caustique, « le nain » qui nous plonge dans ce monde inquiétant. Son héros, que la mère a vendu à la naissance – la difformité est une marchandise – « épie, méprise, dénonce, torture, tue … » Il élimine un nain concurrent …  Il faut mériter les faveurs du maître.

C’est un petit jeu dangereux …

A déguster sans modération. Toute ressemblance avec des personnages

2- De la Rocque n’était finalement que l’héritier du boulangisme. Par la suite, on a connu le poujadisme et différents variants nostalgiques de l’Ancien régime, voire du bonapartisme. (« Napoléon sut incarner l’ordre » déclare E. Macron devant une classe de lycéens). Tous ces individus considèrent avec Thomas d’Aquin que « la multitude est mieux gouvernée par un seul plutôt que par plusieurs ».

3- Il se heurte à l’hostilité de la hiérarchie catholique qui a déjà « sa » CFTC. La CFTC devait combattre l’idée même de grève. On voit que de la doctrine à la pratique, c’est parfois un peu dur, puisque la CFTC de mars 2023 appelle au « blocage du pays » avec 7 autres syndicats.

Tant mieux.

D’autres ont un point de vu opposé. Citons Aurore Bergé, la chefFE de renaissance à l’Assemblée nationale, formatée par le syndicat d’extrême droite, l’UNI, qui déclare :

« La grève n’autorise pas le blocage du pays » ce qui nous renvoie inévitablement à cette déclaration de Benito Mussolini, en mars 1919, devant des ouvriers métallurgistes à Dalmine : « Vous avez inventé la grève d’un genre nouveau, celle qui ne bloque pas la production … » comme s’il y avait des « porosités » entre la droite dite « libérale » ou « extrême » libérale et le fascisme. Oh, mon dieu !

4- Pour connaître le détail, rien ne vaut la lecture édifiante de ce pavé réalisé par un admirateur assumé du colonel, l’historien Jacques Nobécourt : « le colonel de La Rocque où les pièges du nationalisme chrétien. 1886-1946 ». 1200 pages). C’est long mais ça se lit comme un roman dont il est possible de tirer de nombreux enseignements pour aujourd’hui.

5- La Conférence des évêques a adopté en 2016 une déclaration pour désigner – sans le nommer – son candidat favori. On y lit ceci :

« La France a un potentiel important de dynamisme. On le voit dans tous les domaines. C’est le cas dans le domaine économique, où par exemple, de plus en plus de start-up innovantes voient le jour ».

En avril 2018, le candidat élu de la France des start-up rêvées « sans statut » confie aux 400 invités devant ses amis jésuites des Bernardins : « Il me faut rappeler la clarté parfaite du texte proposé par la Conférence des évêques ».

JM. 4 mars 2023

chaud ! chaud ! chaud !

leurs revendications concernent la réforme des retraites: Appel à la grève dès le 5 décembre

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