>Édito

2 / 04 / 2014

L’ampleur de la raclée… 

A peine deux ans après la chute de Sarkozy, voici venu le tour d’Hollande.

Logique, les mêmes causes produisent les mêmes effets. En réalité, ce n’est ni Sarkozy, ni Hollande qui sont sanctionnés à l’occasion de ces échéances électorales. C’est bien une politique, celle imposée par l’Union européenne, qui, une nouvelle fois, est rejetée. Ce n’est pas une surprise, depuis des années c’est la même chanson. Le gouvernement en place est désavoué. Après quelques déclarations du type : «nous avons entendu le message des français», on passe aux affaires courantes. De temps en temps, pour occuper les journalistes, on remanie. Ce sont les chaises musicales. Gouvernement resserré, parfois même changement de Premier ministre, un Valls chasse un Ayrault… Et l’on poursuit la même politique.

Les commentateurs de tous poils sont friands de ce grand cirque. Tous ces gens là ont un immense mépris pour la classe ouvrière. Ils pensent certainement que toutes ces singeries vont nous «occuper» suffisamment pour nous faire oublier l’essentiel. Ils  pensent nous berner. Eh bien ils se trompent. Cet aveuglement n’est pas nouveau.

En 1789, alors que les parisiens venaient de prendre la Bastille et promenaient la tête de son gouverneur au bout d’une pique, Louis XVI surpris déclarait : « mais c’est une révolte ? ». Le Duc de Liancourt lui répondit : « non Sire, c’est une révolution ! ». Ce même jour le roi avait même écrit sur son carnet : « rien ». On connaît la suite …

A la veille de la Révolution de 1848, Alexis de Tocqueville, devant les députés, qui déjà ne comprenaient rien à la situation, déclarait : « on dit qu’il n’y a point de péril parce qu’il n’y a pas d’émeute (…) sans doute, le désordre n’est pas dans les faits, mais il est entré bien profondément dans les esprits (…) et ne croyez-vous pas que, quand de telles opinions prennent racine, quand elles se répandent d’une manière presque générale, quand elles descendent profondément dans les masses, elles amènent tôt ou tard, je ne sais pas quand, je ne sais pas comment, mais elles amènent tôt ou tard les révolutions les plus redoutables ? » (voir météo sociale page 4)

 « Tôt ou tard » ? Il y a quand même une certitude : à chaque élection, de plus en plus nombreux, les électeurs, en particulier les travailleurs, choisissent l’abstention. A ces élections municipales, le record, à nouveau, a été battu, alors que 10%, soit environ 4 millions de français, refusent carrément et souvent délibérément de s’inscrire sur les listes.

A chaque soirée électorale, les gagnants se réjouissent, les perdants eux pensent déjà à la prochaine fois. C’est un coup je te vois, un coup je ne te vois pas !

Suite à cette bérézina, le Président de la République persiste et signe. Il maintient l’intégralité de sa politique, en particulier le pacte de responsabilité qui a été rejeté le 18 mars. Circulez, il n’y a rien à voir. Pire, il aggrave encore sa politique. Il annonce, entre autres, la baisse des cotisations sociales sur les salaires. En clair, il assèche le financement de notre protection sociale. Il est donc certain que les quelques euros de plus sur nos fiches de paie serviront rapidement à faire face aux augmentations des tarifs des mutuelles et des assurances.

Nous aurons donc de nouveaux ministres. Peut-être y aura-t-il quelques semaines d’expectative dues à l’intérêt de la nouveauté. Ce n’est même pas certain tant le rejet est profond.

Le gouvernement va encore utiliser son syndicat officiel, la CFDT, pour porter ces nouveaux mauvais coups.

Piètre point d’appui, la combine est éculée. Comme les trois singes, les futurs ministres voudront ne rien voir, ne rien entendre, par contre ils bavasseront. Ils ne veulent rien écouter, il n’est même pas certain qu’ils entendent. Le précédent gouvernement, avec la complicité active de la presse, a ignoré la mobilisation du 18 mars.

Ce mépris est insupportable ! Au rejet exprimé sur des terrains différents par les électeurs et par les grévistes et manifestants du 18 mars, le Président de la République répond par des palinodies et quelques nouveaux ministres satisfaits d’eux-mêmes.

Alors il n’y a pas d’autre solution que de faire jouer le rapport de force.

Alexis de Tocqueville a raison : … Tôt ou tard ! 

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La météo sociale

21 millions d’abstentionnistes au premier tour des élections municipales ! Une grève du vote particulièrement suivie dans les quartiers ouvriers et populaires. A l’heure où nous écrivons, nous ne savons pas si les briseurs de grève de tous bords, lancés à la chasse aux abstentionnistes entre les deux tours, auront réussi à inverser la tendance. Mais rien n’est moins sûr !

« L’Elysée, titre Le Monde, a été surpris par l’étendue des dégâts électoraux ». Ces gens-là n’ont rien vu venir. Pas plus qu’ils n’ont vu ou voulu voir la grève et les manifestations du 18 mars. Ils vivent dans une bulle, déconnectés de la réalité, comme Marie-Antoinette jetant au peuple affamé : « S’ils n’ont pas de pain, qu’ils mangent de la brioche » …

« Je crois que nous nous endormons à l’heure qu’il est sur un volcan » disait Alexis de Tocqueville dans un discours prononcé à la Chambre des Députés à la veille de la Révolution de 1848 (1). Il ajoutait face au déni de ses pairs : « On dit qu’il n’y a point de péril, parce qu’il n’y a pas d’émeute (…). Sans doute, le désordre n’est pas dans les faits, mais il est entré bien profondément dans les esprits. Regardez ce qui se passe au sein de ces classes ouvrières (…). Ne voyez-vous pas qu’il se répand peu à peu dans leur sein des opinions, des idées, qui ne visent point seulement à renverser telles lois, tel ministère, tel gouvernement, mais la société même, à l’ébranler sur les bases sur lesquelles elles reposent aujourd’hui ? Ne voyez-vous pas que, peu à peu, il se dit dans leur sein que tout ce qui se trouve au-dessus d’elles est incapable et indigne de les gouverner ; que la division des biens faite jusqu’à présent dans le monde est injuste ; que la propriété y repose sur des bases qui ne sont pas des bases équitables ? 

Et ne croyez-vous pas que, quand de telles opinions prennent racine, quand elles se répandent d’une manière presque générale, quand elles descendent profondément dans les masses, elles amènent tôt ou tard, je ne sais pas quand, je ne sais comment, mais elles amènent tôt ou tard les révolutions les plus redoutables ? ».

Plus près de nous, il ne s’est trouvé qu’un seul journaliste pour s’étonner du déni général (2) : « Il était tout à fait frappant, dimanche 23 mars au soir, de n’entendre aucune mise en contexte européenne du résultat du premier tour des élections municipales françaises. (…) Ce mouvement de rejet des partis traditionnels de gouvernement semble en fait s’installer dans toute la zone euro.(…) S’inspirant de la doxa ordo-libérale que le peuple ne doit pas se mêler d’économie, la nouvelle zone euro a mis des « garde-fous » contre la démocratie. C’est la « règle d’or » (…) , c’est la surveillance bruxelloise des lois de finances, sans parler de l’indépendance de la BCE qui n’est pas une nouveauté. 

Le sentiment qui en découle, c’est une impuissance du peuple à modifier la politique économique. (…) Après avoir promis d’en finir avec l’Europe « à la Merkel », François Hollande a rapidement rendu les armes, au bout d’un mois et a fait voter le pacte budgétaire par des députés qui avaient fait campagne contre lui. 

Et désormais, le discours du gouvernement est clair: toute remise en cause des choix effectués au niveau européen relève de « l’extrême-droite » (…) Mais si les choix économiques ne sont pas négociables, si les budgets sont encadrés par des structures non élues, si toute discussion est impossible, à quoi bon voter ?

De la grève du vote à la grève tout court, il n’y a désormais qu’un pas …

JA

 1- Extraits du discours à la Chambre des députés prononcé le 27 janvier 1848.

  2- Romanic Godin dans La Tribune du 24 mars. 

chaud ! chaud ! chaud !

leurs revendications concernent la réforme des retraites: Appel à la grève dès le 5 décembre

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