France 9 / 12 / 2017
La neutralité religieuse dans une entreprise ne doit pas donner lieu à une discrimination et doit figurer clairement dans le règlement intérieur (ou une note de service), a fermement énoncé la Cour de cassation dans un arrêt du 22 novembre 2017 (Cass, soc., 22-11-17, n°13-19855).
Une salariée avait refusé de renoncer au port du foulard islamique dans l’exercice de ses activités professionnelles et des clients s’étaient plaints auprès de son employeur. Embauchée en CDI en 2008, elle était licenciée pour faute en 2009. Elle s’était alors tournée vers la juridiction prud’homale en faisant valoir que son licenciement constituait une mesure discriminatoire en raison de ses convictions religieuses. Après avoir perdu en première instance, puis en appel, cette ingénieure en études pour un cabinet de conseil s’était portée en cassation. La Haute juridiction lui a donné raison.
9 %
C’est le pourcentage de cas conflictuels dans les faits religieux en entreprises privées en 2016 (sondage institut Randstad-OFRE).
La Cour de cassation s’est appuyée sur le droit européen mais aussi sur le Code du travail. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), le 14 mars 2017, a en effet considéré qu’en l’espèce l’interdiction d’un voile islamique ne pouvait être justifiée, à moins qu’elle ne soit objectivement justifiée par un objectif légitime, tel que la poursuite par l’employeur, dans ses relations avec ses clients, d’une politique de neutralité politique, philosophique ainsi que religieuse
. Précisant qu’en ce cas, l’employeur devait lui trouver un autre poste. Ce qui n’avait pas été fait.
D’autre part, la Cour de cassation a énoncé que l’employeur peut imposer une clause de neutralité
qui interdit le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients
, mais cela dans un règlement intérieur ou une note de service.
Or il n’y avait eu qu’un ordre oral visant un signe religieux déterminé
, donnant lieu à une discrimination directement fondée sur les convictions religieuses
, alors que l’employeur est investi de la mission de faire respecter au sein de la communauté de travail l’ensemble des libertés et droits fondamentaux de chaque salarié
.
En pratique : Manifestation des convictions des salariés et règlement
Selon l’article L1321-2-1 du Code du travail, le règlement intérieur peut contenir des dispositions inscrivant le principe de neutralité et restreignant la manifestation des convictions des salariés si ces restrictions sont justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché.