20 / 02 / 2021
Nous avons affirmé en introduction que ce gouvernement cherche à profiter de la « crise sanitaire » pour éloigner élèves et étudiants des écoles, mais aussi, éloigner les patients des médecins. L’actualité n’a pas tardé à le confirmer. C’est le cas avec les arrêts maladie délivrés automatiquement sur le site internet de l’Assurance maladie. Le médecin traitant devient inutile. De là, à ce qu’il devienne gênant s’il tente de s’affranchir de la pesante tutelle de l’ORDRE des médecins (qui date de Vichy)…
On ne peut non plus passer sous silence l’acharnement du gouvernement à poursuivre la politique de démantèlement de l’hôpital. Le syndicat FO des praticiens hospitaliers (SNMH-FO) a établi une liste des établissements touchés :
– Regroupement des hôpitaux de Juvisy, Longjumeau et Orsay : 600 lits supprimés
– Hôpital nord à Paris (fusion Bichat-Beaujon) : 300 lits supprimés.
– Limeil Brévanne dans le Val de Marne : 150 lits supprimés.
– Reims ; il existe un « comité pour la performance et la modernisation » qui décide : 184 lits supprimés.
– Tours : 360 lits supprimés d’ici 2026 etc.
L’Education nationale n’y échappe pas. Le syndicat FO des lycées et collèges dénonce la suppression de 1800 postes d’enseignants du second degré pour 43 500 élèves supplémentaires …
Saccage programmé de l’hôpital public, de l’école publique ! Le président a déclaré : « on s’était habitués à être libres, maintenant soyons solidaires » !
Elle est belle leur solidarité.
Jean Zay ministre. (Assassiné par les vichystes de 1944).
Circulaire du ministre Jean Zay (SFIO) du 15 mai 1937 ;
« Ma circulaire du 31 décembre 1936 a attiré l’attention de l’administration et des chefs d’établissement sur la nécessité de maintenir l’enseignement public de tous les degrés à l’abri des propagandes politiques … il va de soi que les mêmes prescriptions s’appliquent aux propagandes confessionnelles. Aucune forme de prosélytisme ne saurait être admise dans les établissements. Je vous demande d’y veiller avec une fermeté sans défaillance ». C’est clair et bien dit.
Seulement voilà, nous sommes passés de l’enseignement public à l’éducation nationale, de la laïcité institutionnelle à la « laïcité dite « ouverte » avec ses conseils de gestion tripartite, véritables machines de guerre contre l’enseignement et ses personnels, de la SFIO au parti « socialiste » des néo corporatistes de Maire, Rocard et Delors avec leur sacro-sainte gestion tripartite.
Les conseils d’école.
On a vu que le ministre de « droite » R. Haby avait institué les comités de parents, réforme jugée bien trop timide par la gauche pieuse. Un secrétaire général du SNI, Guy Georges avait dit, très justement : « c’est la plus grave attaque contre l’école publique depuis Pétain ». Mais il avait choisi plus tard, de se taire. (La note du Maitron qui lui est consacrée ne signale pas cette prise de position clairvoyante et courageuse. Dommage.)
Le conseil d’école : plus c’est bref, mieux c’est …
Prost, au rapport !
En 1985, Antoine Prost publie « éloge des pédagogues ». Il y parle de décentralisation, la grande œuvre du second septennat de Mitterrand. « Une décentralisation qui se contenterait de transférer une partie des pouvoirs de l’Etat aux collectivités locales serait sans intérêt ». Tant qu’à casser le service public, autant y aller carrément ! « En matière d’enseignement, la véritable décentralisation consiste à augmenter les pouvoirs des établissements ». Le député de Redon, A. Madelin explique la même chose dans un autre livre (1985 aussi) : « libérez l’école ! ». Il y fait l’éloge du « lycée différent » de Saint-Nazaire.
Casser les garanties statutaires par la magie du tripartisme.
« La participation est à la mesure des pouvoirs du conseil. Comment demander aux parents de se mobiliser pour des conseils largement inutiles. Le conseil n’a pas de pouvoir, ni sur les horaires, ni sur les programmes, ni sur la discipline, ni sur les équipes pédagogiques, bref, sur rien d’important … »
Réformateur pieux, Prost ne cache pas sa déception. C’est que les « parents d’élèves » sont aussi des salariés à qui on ne la fait pas. L’école doit rester l’école ; ce n’est pas un lieu de vie réservé aux grenouilles de bénitier et associations diverses locales qui y feraient la pluie et le beau temps.
A Nantes.
A la rentrée de septembre 1985, l’évêque de Nantes, Mgr Marcus, partisan de la « transformation » de l’école publique a les honneurs du quotidien Ouest-France.
« Mgr Marcus : donnez à chaque école le souffle dont elle a besoin ! » et d’inciter les fidèles à militer dans les conseils d’école. Le même jour, certainement un hasard du calendrier, l’Union départementale CFDT et la FCPE adoptent un communiqué commun en faveur des conseils d’école. Dans la presse locale, la section départementale du Syndicat national des Instituteurs de Loire-Atlantique, est régulièrement l’objet d’articles venimeux. Le syndicat se prononce encore fermement contre toute forme de gestion tripartite.
Mars 1988, c’est le rapport Lesourne qui enchante « le Monde de l’éducation » extraits :
« ( … ) Jamais le diplôme ne devrait prévaloir sur la réalité des performances constatées … l’institution scolaire doit accepter la concurrence … le drame, c’est que les innovations se heurtent souvent à la résistance de la base … » il y aurait bien une solution : supprimer la « base » ; ne conserver que les « élites », et, pourquoi pas, dissoudre le peuple et en élire un autre …
Les réformateurs pieux, ennemis de l’école, du savoir, des Lumières accumulent rapports et expertises. Qu’en reste-t-il finalement ? Fort heureusement, pas grand-chose même si des coups sont portés, parfois rudes. Ainsi au collège, sous le ministère Chevènement, les heures d’enseignement du français et des mathématiques diminuent sérieusement.
En juin 1988, paraît un « programme socialiste pour l’école », toujours plus moderne … on y prône une nécessaire « révolution mentale ». Qu’est-ce que cela peut bien signifier ? Yannick Simbron (chef de l’ex FEN) qui assure le SAV, nous explique : « D’abord, la revalorisation est subordonnée à l’acceptation du « travailler autrement », cher aux pédagos de salon. La FEN, nous dit le Monde est chargée de convertir les enseignants : « ils doivent accepter les stages en entreprise, le travail en équipes, l’avancement au mérite … »
16 ans après l’entrée de la CFDT au CNAL, la FEN n’est plus qu’une annexe du MEDEFDT.
Comment enseigner sereinement si l’on est placé sous la férule des « dames patronnesses « ?
Le 10 mai 1989, le projet de loi d’orientation Jospin-Rocard est présenté pour avis devant le Conseil Economique et social.
Contre les résistants, Jospin sort l’artillerie lourde.
Jospin rend obligatoire la participation des instituteurs aux réunions de conseils d’école Sa loi d’orientation de 1989 est une véritable déclaration de guerre contre la majorité des personnels qui résiste dans des conditions souvent difficiles aux pressions inamicales des groupes de pression.
Le SNI et la FEN ont voté pour. C’est la police du ministère.
La CFDT, la CFTC et le CNPF ont voté pour. La CGT s’est abstenue. Le représentant des chefs d’établissement de l’enseignement privé confessionnel a déclaré, tout réjoui : « Comment ne pas se déclarer satisfait d’une loi qui reconnaît la communauté éducative et le projet d’établissement ? »
Le groupe FO, appliquant le mandat donné par le congrès confédéral a voté contre le texte du ministère.
Pour en savoir plus : loi Jospin, loi scélérate.
Rocard et Mgr Decourtray, l’entente cordiale. Parmi les adeptes du « rocardisme » figure en bonne place le père Henri Madelin, provincial des jésuites. En 1982, le Monde lui demande ce qu’il espère du « grand service unifié » des « socialistes. Le jésuite jovial répond : « Dans le socialisme, il y a deux conceptions de l’Etat, ici je vais faire du rocardisme … » et de développer, très bien d’ailleurs, le programme néo socialiste-corporatiste des « rocardiens ». Tout le monde n’est pas dupe.
Des enseignants résistants prennent la plume.
L’offensive des réformateurs pieux suscitent de nombreuses réactions. Toutes sortes de points de vue s’expriment. C’est le libre débat.
Dans leur livre « le poisson rouge dans le Perrier », paru en 1983, J. C. Despin et M.C. Bartholy démasquent avec humour les pontifes et les prosélytes de l’école « rénovée », les ministres et les conseillers, les « chargés de mission » sans oublier – ici leur cas s’aggrave – les complicités de « l’appareil syndical » (celui de la FEN). Un secrétaire général du SNI, Barbarant, avait proclamé : « il faut rompre avec l’uniformité actuelle et le modèle unique … renoncer à l’encyclopédisme et l’illusion des programmes ». Les néo vichystes de la FEN disputent aux adeptes du SGEN-CFDT les honneurs du pouvoir.
Les auteurs citent cette profonde pensée d’une inspectrice de circonscription (enseignement primaire) :
« Les enfants n’ont pas besoin d’apprendre quoi que ce soit à l’école primaire. Ils auront bien le temps de le faire dans le secondaire … » Simples propos d’une illuminée ? Hélas non.
Un autre converti aux « nouvelles pédagogies » a la parole dans Charlie-hebdo :
« Nous essayons d’avoir une attitude éducative. Educative, ça veut dire qu’on apprend rien aux gosses, on met entre leurs mains le matériau intellectuel et concret, physique pour qu’ils découvrent eux-mêmes (ou pas) le plus de choses possibles … »
Question : « Comment enseignes-tu l’orthographe et la grammaire au primaire ? »
Réponse : « Je ne l’enseigne pas … un prof m’a dit : si je vous vois faire une leçon de conjugaison, je vous mets E à votre rapport ».
L’enseignement devra-t-il s’exercer en cachette ?
Dans son « journal d’une institutrice clandestine » Rachel Boutonnet relate son passage à l’IUFM censé formé les enseignants :
« Dès mon entrée à l’IUFM, (1) j’ai presque aussitôt compris que je n’avais rien à en attendre. Nous avons en tout et pour tout passé 6 heures sur l’année à l’enseignement de la lecture et de l’écriture ! Le crédo des formateurs se résumait à : le maître ne doit pas être un référent pour l’apprenant (l’élève). J’ai donc résolu de me comporter en reporter clandestin … J’applique les méthodes pédagogiques auxquelles j’ai longuement réfléchi, qui sont précisément celles que l’IUFM voue aux gémonies mais je vois mes élèves apprendre et en être fiers ». Apprendre et en être fiers. Mon dieu ! Quelle horreur pour nos pieux pédagogues d’avant-garde !
Charles Coutel, professeur de philosophie, se définit comme un « républicain intempestif ». Il dénonce dans « que vive l’école républicaine » paru en 1999, l’adaptation de l’école à la loi du marché et s’oppose à la démagogie des partisans de « l’école ouverte sur la vie » et du « lycée light » où l’enseignement est mal vu :
« Le pédagogisme pour l’école a comme rôle de trouver des justifications des décisions politiques du ministère. Ainsi se découvrirent des besoins d’aides-éducateurs quand furent créés les emplois-jeunes. L’autodiscipline des élèves accompagna la suppression des postes de surveillants. Autre exemple, pour faire moderne, le pédagogisme dans le récent projet sur les collèges – encore un ! – on demande à l’élève de quatrième d’être déjà conscient de son propre projet professionnel individualisé. On ne s’est pas avisé que cet élève peut ne pas savoir lire ou presque ! Dès que l’on fait de l’école le reflet de la société ou du marché, le rappel de la mission fondamentale de l’école paraît intempestif. Si l’école n’instruit plus et ne cultive plus ? Qui le fera ? ».
Jean-Claude Michéa dans son « enseignement de l’ignorance » (2) nous apprend que les membres d’une « fondation Gorbatchev qui réunit 500 hommes politiques, leaders économiques et scientifiques de premiers plans, constituant à leur propres yeux l’élite du monde, se sont réunis pour confronter leurs vues sur le destin de la nouvelle civilisation … l’assemblée commença par reconnaître comme une évidence que dans le siècle à venir (donc maintenant ) deux dixièmes de la population active suffiraient à maintenir l’activité de l’économie mondiale ». La fondation assure : « Il faudrait généraliser la pratique de l’instrument multi média à distance ». JC Michéa indique :
« Des dizaines de milliers d’enseignants deviendront donc inutiles ». L’institut Jean Lecanuet de 2020 n’a rien inventé.
D’autres encore ont jeté des pavés dans le marigot. Jacqueline de Romilly, « l’enseignement en détresse » ; Jacques Muglioni, « l’école ou le loisir de penser » … Catherine Kintzler, « Condorcet … »
Au-delà de ces résistances, la question posée reste bien évidemment l’établissement du rapport de force permettant de stopper les contre-réformes, puis de rétablir ce qui a été détruit. C’est la fonction du syndicat. C’est ce à quoi s’emploient les syndicats FO.
Document : après Illich, Rocard soutient Meirieu, chantre de l’obscurantisme … chantre des « noyaux minimum de connaissances ». Rocard 1er ministre de mai 1988 à mai 1991, a beaucoup de projets innovants : CSG, retraites … Il se verrait bien aussi chef de guerre : Le14 janvier 1991, il confesse :
« Je ne suis pas de ceux qui ont souhaité la guerre (en Irak), même si j’entends, comme premier ministre pour la part qui est la mienne, la conduire avec détermination ». Mais sous la Vème République, la fonction de chef de guerre revient au président de la République.
(1) Le régime de Vichy avait une première fois supprimé les écoles normales d’instituteurs, rétablies à la Libération. Les gouvernements de la Vème république ont tout fait pour les détruire en organisant méthodiquement la décomposition de l’institution.
(2) Le sixième et dernier « ministre » de l’Education de Vichy, Abel Bonnard est l’auteur d’ « une éloge de l’ignorance ». tout un programme !
L’idéologue Philippe Meirieu a actualisé le propos : en se prononçant pour des « noyaux minimum de connaissances … » selon Libération, il est « le pédagogue le plus écouté de nos gouvernants ». Il est chroniqueur au journal catholique LA VIE de 2010 à 2020. Conseiller chéri de Claude Allègre …
Lang, Bayrou, Allègre …
Le 12 janvier 1993 paraît ce communiqué de la CGT-FO ; Jack Lang est alors ministre en charge de la démolition du service public :
« Après l’énorme cadeau qu’il lui fit en juin, Jack Lang vient de concéder à l’enseignement catholique la prise en charge par l’Etat de la formation de ses maîtres (sous) estimée à 500 millions de francs par année pleine … Jack Lang vient d’acheter sa part de paradis ».
Le père Cloupet qui a négocié la bonne affaire, ne cache pas sa satisfaction : « Sur le fond, je tiens à vous dire la satisfaction de constater que les possibilités d’aides ouvertes par la loi pour les établissements privés techniques ou agricoles, la loi Rocard de 1984, ne sont plus en contradiction avec la loi qui frappait les écoles primaires, les collèges et les lycées d’enseignement général de l’école privée … » autrement dit, AMEN le fric ! et participe à la « rénovation » de l’école publique !
« Il faut faire avancer les décisions dans des négociations attentives et discrètes » susurre Rocard.
Discrètes ? C’est loupé puisque FO a vendu la mèche.
En 1994, François Bayrou succède à Jack Lang. Il déclare le 1er avril :
« Je n’entends pas créer de grandes secousses ni de grandes réformes vouées à l’échec par leur caractère monumental … lorsqu’il s’agit de l’école, je ne suis ni de droite, ni de gauche, je suis du parti des enfants et des enseignants ». Du moment que ce n’est pas le parti d’en rire …
Pourtant, il présente son « nouveau contrat pour l’école » ; pas moins de 155 propositions ! Il s’agit bien sûr pour l’essentiel de la reprise des projets antérieurs. Avant d’être ministre, Bayrou s’était moqué des fameuses « zéquipes pédagogiques ». Cette tentative d’échapper, même partiellement aux pédagogistes pieux n’aura pas résisté longtemps. Cette fois, c’est surtout l’appareil de la FSU fondamentalement hostile à la liberté pédagogique individuelle, qui monte au front. On ne se moque pas des rénovateurs. On leur obéit.
Bayrou, adepte de la « démocratie participative » fait semblant d’engager une « vaste consultation » : tables rondes, groupes de travail, commission de suivi pour les « corps intermédiaires » qui veulent mieux « s’impliquer ». Le ministre est partisan d’adopter le principe clérical de subsidiarité. Dans les écoles, une demi-journée est banalisée pour permettre aux instits de bavarder en toute liberté. Evidemment, tout est bouclé depuis longtemps.
Les dirigeants de l’UNSA de la CFDT et de la FSU se réjouissent qu’il y ait cette « consultation », mais (il y a toujours un « mais » quand le ministre n’est pas directement un camarade-ministre), se plaignent de la « méthode », du « manque de temps ». Bref, c’est l’éternelle comédie de la « participation ».
A l’inverse FO rappelle que le rôle du syndicat n’est pas de se comporter en « contre-pouvoir » mais de défendre les revendications des personnels.
Le journal financier les échos note avec gourmandise :
« Clairs et lisibles par tous », les nouveaux programmes de l’école primaire présentés par le ministre de l’Education nationale, François Bayrou, « veulent échapper à la malédiction de l’encyclopédisme » … comme le prévoyait le Nouveau Contrat pour l’école établi au printemps 1994 … » (22 février 1995). Carcopino n’en finit de faire des émules.
Les « Zéquipes » savent ce qu’elles devraient faire : enseigner, toujours moins … ce n’est pas pour autant que les personnels vont se soumettre.
La méthode Bayrou : associer les corps intermédiaires n’aura pas suffi ; notamment parce que la fédération FO tient bon sur les revendications statutaires et que les enseignants ne sont pas dupes de la manœuvre.
(Bayrou préside maintenant aux destinées du nouveau Commissariat au PLAN. Il a demandé aux syndicats de désigner leurs « sherpas » pour cogérer les « réformes »).
« L’école du XXIème siècle ».
Claude Allègre (ministre de l’EN de juin 1997 à mars 2000) et Ségolène Royal. Voir : Royal propose un « pacte » aux syndicats enseignants pour … les 35 heures … (en 2006). Visualisez ICI
Avec Claude Allègre, la « réforme des lycées» est engagée titre gaillardement le Monde. L’honorable quotidien parle même de « révolution allègre ».
Les ministères précédents avaient concentré les attaques contre les écoles et les collèges. Allègre s’en prend maintenant au lycée. La tâche est ardue. Comment contraindre, par exemple, un prof de maths de terminale à faire autre chose que de l’enseignement ? C’est Philippe Meirieu qui présidera un « conseil scientifique » chargé d’établir une synthèse des « consultations ». Confier à P. Meirieu la « rénovation » des lycées, c’est un peu comme confier la protection de la forêt des landes à un pyromane multi récidiviste.
Parmi les 40 personnalités choisies pour encadrer l’affaire, on note la présence de l’inimitable Ferry, Luc, futur ministre, d’éminents « sociologues de la CFDT, des chefs d’entreprises passionnés par l’avenir du système éducatif …
En novembre 1998, le ministre publie sa « charte pour bâtir une école du XXIème siècle ». Il prétend par la signature de contrats éducatifs locaux, placer les écoles sous la dépendance financière des collectivités locales.
« L’exigence d’une véritable égalité des chances à l’école doit conduire l’éducation nationale à être son propre recours, en particulier pour les enfants en difficulté moyenne ou grave ou pour ceux dont l’origine sociale fait que l’aide à la maison est faible ou inexistante ». L’école est son propre recours. Débrouillez-vous localement avec les moyens du bord. Au plan national, allègre s’engage à « dégraisser le mammouth ».
Allègre veut imposer une « charte pour les lycées », « réforme » soutenue par la FEN. « Au centre du projet : « comme prévu, le nombre d’heures de cours diminue ». Le SNES, pourtant associé aux « discussions » fait la moue : « une réforme qui reste inacceptable parce qu’à moyens constants ».
A plusieurs reprises, l’UD-FO 44 s’adresse à tous les maires du département afin de les mettre en garde contre les projets pernicieux du ministère Allègre.
La brutalité des propos du ministre, la morgue du personnage restent dans les mémoires de ceux qui ont connu cette période.
En 2000 C. Allègre participe à un colloque organisé par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris. Un certain Jean-Pierre Boisivon, de l’Institut de l’Entreprise, un organisme « éducatif » (sic) lié au MEDEF y fait la déclaration suivante :
« Il y a un problème de management de l’éducation. Les établissements doivent être gérés comme de véritables productions autonomes ».
Réponse du ministre : « je suis pleinement d’accord avec M. Boisivon. D’ailleurs, le système allemand qui donne un rôle important à l’alternance école-entreprise, est excellent. » Et, comme un perroquet bien dressé : « toute réforme de l’éducation passe par une décentralisation et une implication plus grande des usagers et des élus … »
Puisque les ministres répètent toujours la même chose, c’est bien qu’ils ne parviennent pas à leurs fins.
Suite à de puissantes manifestations impulsées par la fédération FO de l’enseignement (le Snes doit suivre), Allègre est prié de laisser le ministère à d’autres, chargés, inévitablement, de tenter, d’une façon ou d’une autre, d’imposer la même « réforme ».
Les successeurs se heurtent toujours aux revendications très concrètes des personnels. C’est le cas de ce pauvre J. Lang, successeur d’Allègre qui voit se dresser contre sa politique toute en paillettes, les dures réalités du terrain.
En 2002, les instituteurs de Loire-Atlantique sont en grève. La revendication que popularise le snudi-FO de Loire-Atlantique depuis plusieurs mois est enfin reprise par les autres syndicats.
En commission paritaire l’Inspecteur d’académie avait lâché, bien imprudemment : « il me faudrait 100 postes de remplaçants de plus pour fonctionner normalement ». 100 postes ? Très bien ; le snudi-FO inclut cette donnée dans son chiffrage à 500.
Les AG succèdent aux AG. La grève arrache un plan de 420 postes, dotation étalée sur 3 ans. (1) Pour enseigner, il faut des classes de moins de 25 élèves ! et encore ; 25 dans bien des cas, c’est encore beaucoup trop.
Fin mai, à l’appel du SNUDI-FO suivi notamment par la CGT, une manifestation se déroule à Paris pour exiger l’ouverture immédiate de négociations, en particulier sur les postes statutaires nécessaires. Une délégation est reçue au ministère. Paul Barbier, secrétaire général du SNUDI-FO établit le compte-rendu commun qui se conclut par la nécessité de préparer, de façon intersyndicale, si possible, la rentrée de septembre 2003, d’organiser, par la mobilisation, la résistance.
A la demande de FO un communiqué commun est adopté devant le ministère. Les dirigeants des autres syndicats ne peuvent se déiler devant leurs propres militants.
(1) Finalement, le ministère parvient à n’accorder « que » 380 postes ce qui est déjà considérable. La stratégie des « journées d’action » à répétition qui a si souvent fait la preuve de son inutilité – dans le meilleur des cas – a volé en éclats.
Quatrième et dernière partie : De Luc Ferry à Blanquer.
JM Février 2021.