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1 / 03 / 2023

Éducation : Pourquoi FO a quitté les négociations du Pacte enseignant ?

La FNEC-FP-FO qui a quitté la table des discussions relatives au pacte enseignant fustige une fausse augmentation des salaires conditionnée à de nouvelles missions. Elle exige une revalorisation, sans contrepartie, de la grille et dénonce un piège par ce pacte, véritable outil d’individualisation des carrières.

C’était une promesse de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle. Emmanuel Macron évoquait une hausse des salaires des enseignants, à hauteur de 10%. Mais… Cette augmentation prendrait forme dans un pacte portant la contrepartie de davantage de missions pour ces personnels. Alors que s’ouvraient le 31 janvier, les discussions entre le ministère et les organisations syndicales sur les revalorisations de salaires, le ministère a alors indiqué que la revalorisation ne concernerait que les premiers échelons de la grille salariale et donc, un nombre limité d’enseignants. Pour les échelons plus avancés, il faudrait passer par ce pacte pour espérer une augmentation salariale.

La fédération FO, la FNEC-FP-FO a quitté la table des négociations. « Nous avons pris cette décision dans le cadre de nos instances », explique Christophe Lalande, secrétaire fédéral qui suit le sujet au sein de l’organisation syndicale. « Nous rejetons en masse cette revalorisation qui n’en est pas une puisqu’elle entre dans cette logique de pacte. Rester aux négociations implique une adhésion de principe et discuter du meilleur pacte possible ». En plus de la revendication, comme tous les agents publics, d’une hausse du point d’indice, la fédération exige une revalorisation de la grille salariale des enseignants, lesquels subissent l’inflation comme tous les salariés et qui par ailleurs voient leur profession se précariser. Ce pacte est une forme de « travailler plus pour perdre moins », qui relève de l’« insupportable », estime la FNEC-FP-FO.

Dans le contexte d’entêtement du gouvernement à faire passer sa réforme des retraites, le Pacte est un élément de plus à la colère des enseignants. « Les projets ministériels d’imposer un pacte qui revient à imposer du travail supplémentaire à une profession dont les conditions de travail sont pourtant déjà dégradées, à aggraver les inégalités salariales femmes/hommes, à attaquer le statut et à désorganiser les écoles et établissements sont particulièrement inacceptables et irresponsables », indique le texte de l’intersyndicale de l’Éducation (7 organisations) qui dès le 14 février a appelé à une mobilisation massive le 7 mars contre le projet sur les retraites.

Contre une hausse de salaire, 72 heures supplémentaires de travail par an

Le 8 février, le ministère de l’Éducation nationale a précisé quant à lui aux syndicats quelques éléments sur ce pacte. Les enseignants signataires pourraient gagner jusqu’à 3 640 euros brut avec la possibilité de « moduler » les pactes en fonction du nombre de missions. Mais, en contrepartie, ces volontaires seront tenus d’effectuer diverses tâches, dont certaines seront obligatoires car considérées comme essentielles par le ministère. Sur France Inter, le ministre, Pap Ndiaye, a indiqué que la réalisation de l’ensemble de ces tâches représenterait 72 heures annuelles supplémentaires, cela pour une hausse de salaire équivalant à un gain de 10% sur le salaire moyen.

Parmi les missions supplémentaires évoquées, certaines sont déjà effectuées par les professeurs mais pas toujours rémunérées, comme la coordination de discipline ou les missions de « référents ». D’autres ne concernent que le 2d degré, notamment des remplacements de courte durée au sein de son établissement. « Demander à des enseignants qui ont déjà des classes à charge n’est pas satisfaisant », prévient Christophe Lalande. « Ce qu’il faut, ce n’est pas un pacte mais le recrutement d’enseignants pour reconstituer le vivier de titulaires d’une zone de remplacement (TZR) ». Une autre mission, spécifique aux enseignants du premier degré, prend en compte leur intervention au collège dans le cadre de la nouvelle heure de soutien en 6e. « On voit pointer là la question d’un corps unique », analyse le secrétaire fédéral de la FNEC-FP-FO. Cela laisse présager que les collégiens n’auraient pas nécessairement besoin d’un enseignant spécialisé dans une discipline et cette porte ouverte nous inquiète beaucoup.

La menace d’une accélération de la territorialisation de l’École

Parmi les nombreuses questions que soulève FO, celle du rôle des directeurs d’école et chefs d’établissements dans la mise en application de ce pacte. Ceux-ci devront identifier les besoins de l’établissement, recenser les volontaires, déterminer les missions exercées par chacun et s’assurer de leur réalisation. Une charge de travail conséquente et une transformation de taille dans le premier degré où les directeurs n’ont pas de position hiérarchique par rapport à leurs collègues. Et s’il n’y a pas d’enseignants volontaires ? « La pression va se répercuter sur les collègues », prédit Christophe Lalande. « Mais je pense qu’il y aura des volontaires vu la précarisation de la profession ».

La fédération FO dénonce également la logique territoriale de ce pacte qui intègre dans ses missions la coordination ou l’intervention dans les projets innovants issus du Conseil national de la refondation. « À travers le pacte, les concertations CNR et les fonds d’innovation pédagogique, le ministre vise à accélérer la territorialisation de l’École et la remise en cause des statuts », dénonce le syndicat. « Ce pacte est un outil politique d’individualisation des carrières, comme on le voit actuellement dans le privé. C’est une marche vers la privatisation du système scolaire », affirme haut et fort Christophe Lalande.

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