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8 / 12 / 2020

Coup de pouce au Smic : pandémie ou pas, les experts du gouvernement le refuse toujours

Alors que les fêtes de fin d’année se profilent, que les magasins viennent de rouvrir et que l’exécutif compte sur une embellie de la consommation des ménages pour doper la croissance, il n’y aura pas de soutien au pouvoir d‘achat des salariés les plus modestes. Le comité d’experts économiques sur le Smic conseille au gouvernement, qui suit généralement son avis, de ne pas donner de coup de pouce au salaire minimum et de ne s’en tenir qu’à la seule revalorisation légale, mécanique et minime. FO revendique quant à elle que le Smic soit porté à 1 480 € nets, contre 1 219 € actuellement. La décision sera rendue après la réunion de la CNNC, commission nationale de la négociation collective, prévue le 15 décembre.

Le fameux coup de pouce au Smic n’aura vraisemblablement pas lieu au 1er janvier 2020. Dans son rapport remis le 1er décembre au ministère du Travail, le groupe d’économistes chargé de donner annuellement son avis sur le Smic (salaire minimum interprofessionnel de croissance) ne le recommande pas, comme toutes années précédentes d’ailleurs (hormis en 2012). Dans son rapport annuel, que suit généralement le gouvernement, le comité d’experts reste donc fidèle à son credo d’avant pandémie : préconisant une revalorisation automatique, faible.

Celle-ci est calculée, depuis 2013, à partir de deux paramètres : l’indice de l’inflation (prix à la consommation hors tabac) constatée pour les 20% de ménages aux plus faibles revenus et la moitié du gain de pouvoir d’achat du salaire horaire moyen des ouvriers et des employés ouvrier et employé (SHBOE). Ce sont l’Insee et la Dares qui établissement le calcul de ces indicateurs. Or, sur la base de leurs données provisoires, la revalorisation du Smic pour 2021, dont le taux sera officiellement décidé le 15 décembre par le gouvernement, peut être estimée à 0,99% (contre 1,2% l’an dernier). Cette hausse plus que minimaliste porterait le Smic brut mensuel à environ 1 554 euros au 1er janvier contre 1 539 euros actuellement, soit 15 euros, bruts, de plus par mois.

FO revendique un Smic à 1 480 euros nets

Pour FO, un coup de pouce significatif est pourtant le moyen le plus simple et le plus rapide de redonner du pouvoir d’achat aux bas salaires. Il est plus que jamais nécessaire en ces temps de pandémie alors que la consommation des ménages s’effondre estime Karen Gournay, secrétaire confédérale en charge du secteur de la négociation collective et des salaires. Et de rappeler que FO revendique un Smic à 1 480 € net, contre 1 219 € actuellement, ce qui le placerait à hauteur de 80 % du salaire médian. Une telle hausse est plus que justifiée par le contexte social et économique, en France, comme à l’échelle européenne et ce d’autant que l’épidémie et le confinement ont remis au premier plan la question des bas salaires a souligné FO dans le document qu’elle a présenté le 6 novembre dernier lors de son audition par le comité d’experts sur le Smic.

Qui est payé au Smic ?

En France, au 1er janvier 2019, selon l’Insee, 13,4 % des salariés du secteur privé, soit 2,32 millions de salariés, était payé au Smic, principalement dans l’hôtellerie et la restauration.  La part de bénéficiaires de la revalorisation du Smic est trois fois plus élevée parmi les salariés à temps partiel (29,8 % contre 9,3 % des salariés à temps complet) et au sein des très petites entreprises (28,3 % dans les entreprises de 1 à 9 salariés, contre 10,1 % dans celles de 10 salariés ou plus), indiquait en 2019 la Dares, précisant que si les femmes représentent 44 % des salariés du secteur privé, elles sont 58,5 % parmi les salariés concernés par la hausse du Smic. Cette part atteint 65% dans les entreprises de 500 salariés ou plus.

FO rappelle que le salaire n’est pas ennemi de l’emploi

Le groupe d’experts justifie sa recommandation par des raisons structurelles auxquelles s’ajoutent les effets de la crise due à la Covid-19. Il souligne que le chômage reste élevé, la compétitivité et les marges des entreprises trop faibles, ce ne serait donc pas propice à une hausse du Smic. Comme chaque année en somme et quelle que soit la conjoncture ! Ce sont les habituels arguments avancés par le groupe pour s’opposer à tout coup de pouce au Smic, s’insurge Karen Gournay. Il est regrettable que le groupe d’experts s’appuie toujours sur le même principe selon lequel le Smic est un frein à l’emploi. Or, le salaire n’est pas l’ennemi de l’emploi, le problème résidant plutôt dans la baisse d’activité et le marché du travail, et non, comme l’avance le groupe d’experts, avec un prisme de vision qui traduit son orientation, dans le coût du travail.

Outre le fait que le Smic, qui vient de fêter son 50e anniversaire, représente un moyen minimum de vie décente, le document présenté par FO le 6 novembre souligne, qu’à rebours des préconisations du groupe d’experts français, des pays ont relevé significativement leur salaire minimum et cela sans que se produisent les destructions massives d’emplois annoncées. Ainsi en est-il de l’Espagne, du Portugal, de l’Allemagne, (en 2015), et du Royaume-Uni, ce dernier devant porter progressivement son salaire minimum jusqu’au deux-tiers du salaire médian en 2024. De plus, fait valoir FO, la littérature économique n’a jamais démontré que l’augmentation d’un salaire minimum a un impact négatif sur l’emploi.

Un dogme qui oublie la dimension sociale

A de nombreuses reprises, FO a ainsi déploré le dogmatisme du groupe d’experts. En août 2017, à l’occasion de l’annonce de la composition de ce dernier, la confédération avait stigmatisé sa composition monocolore relevant du libéralisme économique et monospécialisée au plan des disciplines. Elle avait regretté qu’il ne compte même plus un sociologue comme cela avait été le cas de 2013 à 2017. La Confédération demandait ainsi de rétablir un sociologue au sein du groupe d’experts, afin de garantir une analyse équilibrée permettant  la prise en considération du Smic et de ses effets dans tous ses aspects, aussi bien dans sa dimension économique que dans sa dimension sociale. Mais en décembre 2017, la composition du groupe n’avait pas été modifiée. Le résultat ne se fait pas attendre avec les premières recommandations de ce groupe qui, non seulement ne plaide pas pour un coup de pouce, mais propose de désindexer en tout ou en partie le Smic, notamment du salaire horaire de base ouvrier et employé s’indignait FO.

Indexation automatique : la supprimer aurait des conséquences dramatiques

En fait, la fin de l’indexation automatique du Smic à l’un des paramètres de calcul, le salaire (SHBOE), est l’une des antiennes du groupe. On retrouve de nouveau cette préconisation dans le rapport 2020 où il est ainsi recommandé un  abandon de tout ou partie de ces clauses de revalorisation automatique. FO s’y est une nouvelle fois opposée, soulignant qu’il s’agirait d’un retour 50 ans en arrière qui donnerait un pouvoir discrétionnaire au pouvoir politique. La confédération remarque par ailleurs que si la désindexation avait été mise en œuvre dès 2000, le Smic serait aujourd’hui inférieur de 30%, ce qui signifierait 400 euros de moins pour un salarié en équivalent temps plein. Elle propose par contre d’intégrer dans le mécanisme d’indexation un indicateur plus stable, prenant entre autres en compte, le poids réel du loyer dans le budget.

Le « groupe d’experts sur le salaire minimum de croissance » a été instauré en 2008 (article 24 de la loi « en faveur des revenus du travail » du 3 décembre 2008), avec pour mission de se prononcer chaque année sur l’évolution du salaire minimum de croissance. Il doit le faire, dans un rapport remis à la Commission nationale de la négociation collective ainsi qu’au gouvernement, au plus tard quinze jours avant la date de la réunion de cette commission, réunion qui est un préalable à la revalorisation annuelle du Smic. Depuis son premier rapport annuel en 2009, ce panel d’économistes s’est toujours montré défavorable à un quelconque coup de pouce au salaire minimum. Disposant chacun d’un mandat de quatre ans, les cinq membres de ce groupe sont choisis  à raison de leur compétence et de leur expérience dans le domaine économique et social et nommés sur la proposition du ministre du Travail, par arrêté du Premier ministre. Ce dernier désigne le président parmi les cinq membres.

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