>Histoire

5 / 10 / 2015

« À gauche de la barricade » 3/7

La CGT en juin 36. 3ème partie.

Blum contre la grève générale.

La grève générale a perturbé les plans de ceux qui, à « droite » ou à « gauche » pensaient contenir sans la moindre difficulté, les revendications des exploités.


Pour des millions de travailleurs, le droit aux vacances devient une réalité. Les droits, les acquis arrachés en 36 sont bien ceux de la grève générale qui a affolé les « élites » et les a momentanément, la rage au cœur, contraint de lâcher du lest, pour ne pas tout perdre.

Delmas note : « Au gouvernement, l’incertitude et l’inquiétude étaient encore plus grande que rue Lafayette ». (Siège de la CGT). « Nous disions à Léon Blum nos inquiétudes sur l’état d’esprit des services publics ».

L’enjeu est simple : les fonctionnaires, dont l’emploi est encore, à priori assuré, vont-ils se joindre aux grévistes du secteur privé ? Delmas tente de se rassurer lui-même :

«  On sentait au contraire beaucoup de sagesse et de réserve chez la plupart des personnels de l’Etat ». Lorsque l’éventualité de la grève (des personnels de la fonction publique) est évoquée devant Blum, Delmas note : « l’expression épouvantée de la physionomie Léon Blum ».* Les personnels de la fonction publique qui observent avec sympathie le développement des grèves du secteur privé ne sont pourtant pas, à priori, hostiles à l’action du gouvernement de Front Populaire ; bien au contraire.

Et pourtant, il n’est pas impossible, car tout est possible en juin 36, que les postiers, les instituteurs, les cheminots et d’autres, rejoignent les travailleurs du secteur privé, dans l’action, « tous ensemble » pour gagner sur les revendications.

Cette perspective « épouvante », encore ! (selon Delmas) Blum qui déclare :

Si c’est ainsi, « j’aime mieux m’en aller tout de suite ».

La CGT dans la tourmente.

On a vu que les orientations des néos  « épouvantent » Blum dès 1933. Très bien. Mais la grève possible des fonctionnaires en juin 36, aux côtés des salariés du secteur privé « l’épouvante » tout autant. Quelles conclusions en tirer ? Bien sûr, les militants syndicalistes véritables, ceux qui n’obéissent pas aux ordres du Kremlin et définissent leurs revendications en fonction des seuls intérêts des travailleurs, et certainement pas en fonction d’un illusoire « intérêt général », ignorent tout des états d’âme de Blum. Dans ce contexte, l’attitude des militants syndicalistes qui ne subordonnent pas leur action aux magouilles des appareils politiciens est déterminante.

La CGT est, inévitablement, l’enjeu principal de la lutte des classes.

Delmas explique : « Le 7 juin, la commission administrative était réunie rue Lafayette. Les dirigeants des diverses fédérations ouvrières donnaient, d’un ton assez découragé, les dernières informations qu’ils avaient recueillies sur la situation dans leurs industries respectives ( …. ) dans l’ensemble le mouvement de grève s’étendait ».

Même, « les ouvriers agricoles retrouvaient dans cette atmosphère révolutionnaire qui enveloppait le pays l’audace de leurs ancêtres dressée contre la tyrannie féodale… »

Alors, décidément, oui, tout était possible ( selon l’expression de Marceau Pivert, socialiste curieusement qualifié de « gauche »).

Réunion de la commission administrative de la CGT.

Léon Jouhaux est secrétaire général de la CGT puis de la CGT réunifiée, avec Frachon de l’ex CGT-U. Jouhaux déclare : « Le syndicalisme doit conserver son entière personnalité. Il ne peut ni ne doit s’inféoder à aucun parti politique ». A l’intérieur de la CGT, les pressions sont fortes pour qu’il n’en soit pas ainsi.

La CA de la CGT se réunit chaque jour. Selon Delmas, le 7 juin, les « dirigeants des différentes fédérations ouvrières donnaient, d’un ton assez découragé, les dernières informations recueillies dans leurs industries respectives ».

Notre néo-syndicaliste insiste sur ce point, essentiel :

«  ( ) Jouhaux venait de dire une fois de plus, avec raison d’ailleurs, que la seule conduite à adopter était de donner l’impression à l’opinion publique que la CGT (qui associe « Socialistes » et « « communistes ») n’avait pas perdu le contrôle des réactions ouvrières et qu’elle seule pourrait ramener le calme … ».

C’est alors que le ministre de l’intérieur Roger Salengro se présente devant la CA de la CGT pour demander à Jouhaux de constituer une délégation syndicale. « Il s’agissait de faire participer une délégation de la CGT à une réunion qui devait se tenir dans l’après-midi à l’Hôtel Matignon sous la présidence de Léon Blum ». Une sorte de « conférence sociale » d’urgence, impromptue …

Les choses sont rondement menées. L’accord est immédiatement signé. Le patronat est prêt à pousser loin le curseur du compromis … pour sauver sa tête.

A l’issue des « négociations » – le patronat signe « le révolver sur la tempe » – le gouvernement tente encore l’intégration de la CGT à l’Etat :

Deux options sont possibles pour la CGT :

la participation ouverte au gouvernement. Un ministre du travail issu de la CGT … ; ce que refuse Jouhaux.
Une collaboration dite « technique », plus discrète. Ici, rien n’est impossible, à priori …
Dans un cas comme dans l’autre, la question de l’indépendance absolue de la Confédération et sa liberté de comportement (Marc Blondel) sont posées.

  • En juin 36, le « tous ensemble » – secteur privé et fonction publique – est la clé du succès. Même chose en juin 53 ; les postiers FO de Bordeaux commencent la grève contre les décrets Laniel. La grève s’étend rapidement et concerne plus de quatre millions de salariés. Même chose en mai 68 ; La section FO de la Snias-Bouguenais est alors à l’avant-garde. Des millions de grévistes reprennent : « 10 ans (de gaullisme), ça suffit ! … »

Sur ordre, le ministre Macron vient, une nouvelle fois, de provoquer les fonctionnaires. Le statut actuel, issu des conquêtes de 1945 serait « dépassé ». Macron, toujours en service commandé, multiplie les attaques contre le code du travail. M. le petit ministre crée lui-même les conditions du « tous ensemble pour bloquer le pays ».

Juin 36, août 53, mai 68 …
J M septembre 2015

chaud ! chaud ! chaud !

leurs revendications concernent la réforme des retraites: Appel à la grève dès le 5 décembre

>Suite

Calendrier de l’UD : cliquez sur les jours

<< Avr 2024 >>
lmmjvsd
1 2 3 4 5 6 7
8 9 10 11 12 13 14
15 16 17 18 19 20 21
22 23 24 25 26 27 28
29 30 1 2 3 4 5