27 / 02 / 2024
Face à la baisse de leurs revenus, les agriculteurs en colère ont lancé une vaste mobilisation le 18 janvier dernier qui a duré deux semaines. Aux quatre coins de l’hexagone, les tracteurs bloquent les autoroutes, les éleveurs déversent du lisier, du foin et des palettes devant les préfectures et autres lieux, symboles du pouvoir ou de l’industrie agro-alimentaire. Les causes produisant les mêmes effets, des mobilisations éclatent également en Allemagne, Pologne, Roumanie, Pays-Bas, Espagne et en Belgique.
De nombreux agriculteurs de petites ou moyennes exploitations se trouvent sur la corde raide, endettés, pressurés par les prédateurs de l’industrie agro-alimentaire et les mesures prises par l’Union européenne et le gouvernement français en faveur de ces derniers.
En l’absence de mesures concrètes du gouvernement, les agriculteurs décident alors de monter à Paris et de bloquer la capitale. Devant cette menace, Gabriel Attal annonce le 1er février de nouvelles mesures, dont une enveloppe de «150 millions d’euros» pour les éleveurs et une « phase massive de contrôle » des industriels et supermarchés.
à la tête de la FNSEA, Arnaud Rousseau, agriculteur mais également homme d’affaires, appelle à « suspendre les blocages » et à «rentrer dans une nouvelle forme de mobilisation». Le Président de la République est soulagé. Il pense même être tiré d’affaire malgré les tensions persistantes. Patatrac ! à l’ouverture du salon, des centaines d’agriculteurs en colère bousculent « le protocole » et s’en prennent à Macron, médusé par autant d’audace. Le président de la FNSEA s’est dit « peiné et attristé » d’un tel spectacle. «Le vent du boulet» n’est pas passé loin et le Président de la République a été contraint de promettre « un prix plancher » pour garantir le revenu des agriculteurs.
De nouvelles mesures seront annoncées et les agriculteurs jugeront sur pièce. Mais une chose est certaine, la colère est là et elle ne retombera pas de sitôt.
Les agriculteurs, qui ne représentent que 2% de la population active, ne montrent-ils pas la voie à suivre pour stopper les mesures brutales annoncées par le gouvernement Attal et qui s’ajoutent à toutes les autres ? En particulier :
– une loi contre le droit de grève,
– le gel du point d’indice et l’introduction du mérite « à tous les étages » dans la fonction publique,
– une loi de « simplification » pour réduire encore plus les droits collectifs de millions de salariés du privé, broyant au passage le code du travail, les conventions collectives et les droits syndicaux,
– une nouvelle coupe budgétaire de 10 milliards d’euros qui va entraîner à titre d’exemple 11 000 suppressions de postes supplémentaires dans l’enseignement.
Nous sommes touchés de plein fouet par toutes les mesures, de plus en plus insupportables, prises par l’exécutif contre celles et ceux qui vivent de leur travail. D’un côté, le patrimoine de 90 % des Français a baissé de 3,9% entre 2019 et 2022 (-15 % pour les 30% les plus pauvres) ; de l’autre, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros sur notre dos depuis 2020 (l’équivalent de 3 400 € par habitant, soit 13 600 € pour une famille de quatre personnes).
Les communiqués communs des confédérations syndicales, à des années lumières des appels du printemps dernier (rejet du recul de l’âge de départ à la retraite), ignorent totalement cette réalité. La dernière déclaration (appel à la journée du 8 mars) reprend quelques formules creuses sans aucun contenu véritablement revendicatif, salue « la grande cause nationale du quinquennat pour l’égalité femmes-hommes », tout en constatant «l’absence d’avancées concrètes». Exit les menaces connues de tous en ce qui concerne les pensions de réversion (4,4 millions de bénéficiaires dont 88% de femmes) et les droits familiaux (y compris la majoration de 8 trimestres par enfant pour le calcul de la retraite).
Mais le « pompon », c’est le communiqué « Ukraine » à rejoindre les manifestations du 24 février sans même l’exigence du cessez-le-feu. Le président peut tranquillement accorder 3 milliards d’aide supplémentaire au gouvernement Ukrainien pour poursuivre la guerre !
Plutôt que d’avoir les yeux tournés vers le petit monde «politico-médiatique», il serait plus avisé d’écouter ce qui se passe « en bas ».
« En bas », il en va effectivement autrement. Tirant les enseignements du mouvement sur les retraites et du souffle mobilisateur apporté par les agriculteurs, de nombreux salariés ou fonctionnaires expriment leur volonté de rompre avec les journées d’action isolées, qui mènent à la défaite. Dans l’Enseignement, cela s’exprime notamment en Loire-Atlantique par une volonté sur le terrain de construire la grève du 19 au 22 mars prochain. Les motions en ce sens se multiplient. Nos camarades du syndicat FO des lycées et collèges ont réuni la semaine dernière des représentants de 22 collèges et lycées pour préparer la grève. Partout où c’est possible, des assemblées générales sont organisées dans l’action commune la plus large. Dans une commune rurale, les agriculteurs ont d’ores et déjà décidé de rejoindre les agents et enseignants du collège en grève le 20 mars. C’est la voie à suivre…
Dernière minute : nous prenons connaissance des déclarations du président de la République faites à l’occasion de la conférence internationale de soutien à l’Ukraine, en particulier le possible envoi de troupes occidentales sur le sol ukrainien. Nous condamnons cette escalade guerrière. La guerre criminelle de Poutine, comme celle de l’Otan mise en œuvre par Zelensky, n’est pas notre guerre. Nous voulons la paix pour le peuple russe et pour le peuple ukrainien, comme pour tous les peuples. Nous mesurons la portée de tels propos, les conséquences concrètes ici même en France d’un embrasement généralisé, en particulier pour la jeunesse. Plus que jamais, le seul mot d’ordre conforme à ce que nous sommes, c’est le « cessez-le-feu ».
par Michel Le Roc’h,
secrétaire général de l’union départementale
CGT-Force Ouvrière de Loire-Atlantique
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