>Histoire

24 / 03 / 2018

« Syndicalisme d’entreprise » ? Pour FO, c’est NON !

Avant l’élection de Mitterrand le 10 mai 81 et l’entrée en force des militants CFDT dans tous les rouages de l’Etat, dans les ministères, le patronat flanqué de son partenaire habituel préféré, ne ménageait pas ses efforts pour tenter, au nom de la « modernisation » des rapports sociaux, d’affaiblir le syndicalisme confédéré. C’est ce que rappelle Jo SALAMERO dans l’article ci-dessous publié dans l’Ouest-syndicaliste de juin 1981.

C’est la CFDT qui mène la danse. Hamon et Rotman révèlent dans leur ouvrage tout à la gloire de la centrale chrétienne, la deuxième gauche, histoire intellectuelle et politique de la CFDT, page 329 :

« ( … ) En acceptant de parler simultanément de la durée du temps de travail (revendication syndicale) et de l’aménagement (souhait patronal) la CFDT a permis que les pourparlers démarrent vraiment ».

L’échec que SALAMERO décrit ci-dessous ne dissuade pas le « syndicat » pro  patronal de remettre le couvert avec les « droits nouveaux des travailleurs » couplés à « l’expression directe des salariés ».

Hamon et Rotman affirment : « L’autre piste explorée par les amis d’Edmond Maire (SG CFDT) concerne le droit d’expression des travailleurs dans l’entreprise. Des conversations occultes avec François Ceyrac (CNPF) était issu un mini groupe d’études, totalement secret, qui a fonctionné pendant deux ans … »

Autant d’offensives qui n’en finissent pas de connaître de nouveaux avatars, le dernier étant les propositions de la commission Senard-Notat. Les deux compères viennent d’être auditionnés par la commission des affaires économiques du sénat, le 22 mars ! Bilan : un concert de louanges, à « droite » comme à « gauche », avec toutefois, une bonne dose de scepticisme.

Nos deux idéologues se proposent de supprimer la lutte des classes, rien de moins. Quelques autres en ont rêvé avant eux.

Le succès de la journée de grève et de manifestations du 22 mars devrait les inciter à une certaine prudence ? Pas sûr.* Désormais, les chefs CFDT et les représentants du patronat s’affichent ouvertement.

Notons une assistance clairsemée. La grève à la SNCF, appelée par les syndicats FO et SUD a été largement suivie. Vive la grève !

J. M. 23-03-2018

 

« PERMANENCE DE LA LUTTE DES CLASSES…

En juillet 1980, le C.N.P.F. a subi une défaite quand les confédérations syndicales ont réfuté de signer son accord sur «l’aménagement de la durée du travail», dont l’objectif était l’individualisation du contrat de travail, voie royale pour «l’expression directe des salariés».

Cette défaite a été possible parce qu’il s’est trouvé assez de militants ouvriers capables de faire front, d’expliquer largement les dangers de la proposition patronale, de créer un courant suffisant pour freiner les tentations de ceux qui étaient près d’accepter, notamment la C.F.D.T.

Mais ne nous y trompons pas: malgré cet échec du CNPF, malgré la campagne électorale qui depuis plusieurs mois monopolise l’attention, l’offensive antisyndicale se poursuit avec obstination et se développera si nous n’y prenons garde. N’ayant pu, pour l’instant parvenir à ses fins avec les «appareils» syndicaux, le C.N.P.F. tente de déborder par la «base». L’exemple le plus marquant est l’accord sur la cinquième équipe signé par la C.F.D.T. et la direction de B.S.N. Nous publions dans ce même numéro, la critique faite par nos camarades de la Fédéchimie C.G.T F.O., non signataires de cet accord.

La tentative anti-syndicale consiste à mettre en place dans les entreprises, des organismes nouveaux, qui rendraient progressivement superflus les syndicats.

Leur nombre étant devenu assez important à terme, les sections syndicales d’entreprises placées devant une situation de fait seraient amenées «par la force des choses» à entériner les expériences, voire y collaborer. L’encore vice-président du C.N.P.F. Yvon Chotard vient de rappeler qu’il est un fervent partisan «du dialogue social» comme «facteur favorisant la compétitivité dans les entreprises».

C’est ce qu’il a retenu d’un récent voyage au Japon où (nous le citons) «l’une des clés de la concertation permanente et de la compétitivité dans l’industrie niponne est l’existence de cercles de qualité qui regroupent au sein des ateliers, les cadres et les ouvriers, et permettent la mise au point d’idées sur la marche de l’entreprise».

En France nous assistons à une prolifération de nouveaux sigles. Il y a les ERACT: équipe de recherche pour l’amélioration des conditions de travail; les G.T.O., Groupes de Travail Opérationnels; et aussi la R.C.A., Recherche Collective d’Amélioration. Il y a mille et une appellations pour qualifier les multiples initiatives décidées par le C.N.P.F. au nom de la nécessaire «innovation sociale» et, disent-ils, au nom de l’«expression directe des salariés».

En liaison avec cette tactique, vient s’ajouter la mise en place de «groupes de concertations», mais aussi les propositions de nouveaux «statuts de la maîtrise», tendant à lui donner davantage de responsabilités, y compris dans le domaine social, en la transformant en service de renseignements, et en faisant de chaque agent de maîtrise, un véritable délégué entre les salariés pris individuellement et la direction. Que nous le voulions ou non, la multiplication des «accords d’entreprises» a considérablement dévalorisé la notion, et l’efficacité des conventions collectives.

 

Jo SALAMERO.

Il semble qu’aujourd’hui, la voie soit ouverte pour passer du syndicalisme d’entreprise au «syndicalisme» d’atelier, de service et à l’individualisation.

C’est une démarche parfaitement logique pour le patronat, que d’être en permanence en guerre contre le syndicalisme confédéré, donc de classe. Pour cela, le C.N.P.F. bénéficie d’alliés privilégiés. L’«Usine Nouvelle» du 12 mars 1981 indique que «la C.F.D.T. souhaitait engager une négociation avec le C.N.P.F. L’organisation patronale lui a opposé une fin de non-recevoir. Il est vrai qu’un obstacle de taille sépare les deux organisations.

En effet si la C.F.D.T. accepte que l’encadrement participe au processus et s’exprime comme les autres salariés, elle refuse que l’animation lui soit confiée. Or. il s’agit là pour le C.N.P.F. d’une question de principe. La démarche cédétiste prouve, en tout cas, que certains syndicats sont prêts, à certaines conditions, à monter dans le train de l’innovation sociale». Gageons que la divergence concernant le rôle de l’encadrement ne sera pas un obstacle majeur à surmonter. C.N.P.F. et C.F.D.T. trouveront facilement le moyen de le balayer, tant leurs intérêts sont convergents. Les premiers ont besoin de «l’expression directe des salariés» qui n’est plus seulement le dernier cri de l’innovation sociale.

A l’instar du C.N.P.F., beaucoup d’entreprises la considèrent comme la voie la plus sûre vers l’innovation tout court. Et cette dernière ne l’oublions pas, est l’arme de choc dont elles entendent se doter pour gagner la guerre économique dans laquelle elles sont engagées» (Usine Nouvelle» -12 mars 1981). Les seconds trouvent dans la mise en pratique de cette formule, le moyen de réaliser les conseils d’ateliers, revendications essentielles de la centrale corporatiste, qui viendraient immanquablement se substituer au syndicat.

Le langage de la C.F.D.T., son engagement pour un «président de gauche» ne nous feront pas oublier le principal: elle reste l’organisation qui milite pour l’intégration des syndicats dans les rouages de l’État afin de garantir, dit-elle, que la planification sera démocratique; elle travaille au démantèlement du syndicalisme confédéré en demandant davantage de «pouvoirs» pour les sections syndicales doublées de «conseils d’ateliers», afin de parfaire la division ouvrière.

Il reste que la classe ouvrière n’a pas dit son dernier mot. Il reste que, nous aurons à batailler. Certes, il est légitime que la classe ouvrière ait rejeté le pouvoir responsable de l’inflation, du chômage, d’un étatisme grandissant, du démantèlement de l’école, de l’offensive contre le secteur public en faveur de la privatisation. Mais il est capital qu’en tout état de cause, les militants ouvriers ne se laissent pas séduire par les apparences, gardent tout leur sens critique en éveil pour déjouer les pièges du néo-corporatisme, d’autant plus dangereux qu’il peut se dissimuler derrière des formules (apparemment) progressistes, véhiculées par des responsables et des organisations ayant acquis la confiance de la classe ouvrière.

Nous aurons donc à continuer le combat: à défendre le droit à la libre négociation contre la politique des revenus (qui n’est pas obligatoirement de droite), la convention collective opposée aux différentes formes d’association capital-travail, l’indépendance syndicale contre la participation.

 Nous aurons à défendre de pied ferme la primauté du syndicalisme contre toute autre forme de représentation des salariés. Dans ce combat permanent, les militants de F.O. comme à l’accoutumée, tiendront leur place, toute leur place. Et elle est loin d’être négligeable ».

 Jo. SALAMERO

*Ainsi Pénicaud a déclaré : « Il faut parfois bousculer les corps intermédiaires au nom de l’intérêt général ».

chaud ! chaud ! chaud !

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