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15 / 12 / 2022

« Sur les retraites, le jour où le gouvernement dit feu, eh bien on fera feu »

Pour le leader de Force ouvrière, le décalage de présentation du projet de réforme des retraites est le signe que l’exécutif doit compter avec les syndicats. Si Emmanuel Macron « s’entête, il prendra le risque de provoquer l’étincelle qui déclenchera un incendie que personne ne pourra arrêter », avertit le leader syndical, dans une interview aux « Echos ».

Publié le 13 déc. 2022 à 6:15Mis à jour le 13 déc. 2022 à 6:57

 

Alors que FO a conforté sa première place au sein de la fonction publique d’Etat lors des élections professionnelles qui se sont achevées jeudi dernier, son numéro un, Frédéric Souillot, affiche sa détermination à combattre la réforme des retraites dont la présentation a été reportée ce lundi par Emmanuel Macron à janvier.

Quel premier bilan tirez-vous des élections de représentativité dans la fonction publique ?
 
 Les résultats définitifs ne seront connus que le 16 décembre. Mais on peut d’ores et déjà affirmer que Force ouvrière sort gagnante de ce scrutin . Nous avons conforté notre première place au sein de l’Etat. Dans la fonction publique hospitalière, où nous avions ravi de peu à la CFDT la deuxième place en 2018, nous avons creusé l’écart, nous rapprochant encore un peu plus de la CGT, en baisse.

Comment lisez-vous ce résultat ?

Cela prouve que la position arrêtée par la confédération en juin lors de son congrès rencontre un bon écho auprès des fonctionnaires. Sur la défense du statut, indispensable pour préserver l’égalité républicaine et la cohésion sociale. Sur les retraites, bien sûr, avec le refus du report de l’âge. Sur le pouvoir d’achat aussi. La hausse de la valeur du point d’indice de janvier ne peut constituer un solde de tout compte. Nous avons écrit à Elisabeth Borne pour demander une clause de revoyure.

Il faut laisser tomber le vote électronique [aux élections dans la fonction publique]. Il a fait perdre toute convivialité au processus électoral.

Ce scrutin a encore moins mobilisé que le précédent…

Il faut laisser tomber le vote électronique. Il a fait perdre toute convivialité au processus électoral, sans compter les agents n’ayant pas d’ordinateur à disposition ou la complexité des procédures, multipliée par le nombre de scrutins différents auxquels étaient appelés les fonctionnaires.

Comment accueillez-vous le report de la présentation de la réforme des retraites au 10 janvier ?

A chaque fois que le président de la République recule, c’est un gain pour les salariés. Dans sa déclaration , il invoque les élections dans la fonction publique, dont le calendrier est connu depuis longtemps. Ce que cela dit, c’est qu’il doit compter avec nous.

Maintenant il faut nous entendre sur le fond. Il n’est pas normal que les syndicats n’aient été reçus par le ministre du Travail, Olivier Dussopt, que pour le lancement des discussions. Les interlocuteurs que nous avons eus ensuite en face de nous, malgré leurs compétences et leur beau costume, n’étaient pas décisionnaires.

Ces rencontres n’ont donc rien apporté ?

Si elles ne servent qu’à nous imposer le report de l’âge de départ , elles ne servent à rien… Le recul de l’âge de départ qui se prépare touchera tout le monde, y compris les carrières longues. Si on dit que les carrières très longues peuvent partir quatre ans avant l’âge légal, cela veut dire pour nous 58 ans [62-4, NDLR], et non pas 60.
 
Par ailleurs, pour tous les régimes spéciaux de la fonction publique, on entend qu’il y aura translation des âges de départ. Travaillons plutôt sur l’emploi des seniors.

Pensez-vous pouvoir obtenir des avancées sur la pénibilité ?

Rappelons que c’est cette majorité qui a supprimé quatre des critères de pénibilité dans le quinquennat précédent. Maintenant, envisager la réintégration de ces critères via les branches, pourquoi pas. Mais dans les discussions que nous avons, il y a beaucoup de si. Nous ne voulons pas d’usine à gaz. Je pense qu’il faut lier le sujet de la réforme des retraites et celle de l’utilisation des excédents de la branche AT-MP. Les excédents doivent servir à faire de la prévention de la pénibilité, par exemple en mettant sur le terrain des seniors qui peuvent aider à mettre en place de solutions de prévention.

Que va changer le report de la présentation de la réforme pour la mobilisation que veut préparer l’intersyndicale ?

La riposte syndicale sera la même. Le projet de loi, on ne le connaît pas mais s’il y a recul de l’âge de départ ou allongement de la durée de cotisations il y aura mobilisation et grèves. Le jour où le gouvernement dit feu, eh bien on fera feu.

Le gouvernement doit avoir conscience du climat social actuel. Les signaux en sont multiples, à commencer par notre congrès confédéral et celui de la CFDT qui ont montré déjà en juin que les retraites sont un sujet explosif. Depuis la rentrée, quelques grèves ont focalisé l’attention – dans les raffineries, à la SNCF… -, mais il y a aussi de nombreux conflits sur tout le territoire. Par exemple chez Sanofi, où ils en sont à leur quatrième semaine de grève.

S’il y a recul de l’âge de départ ou allongement de la durée de cotisations, il y aura mobilisation et grèves.

Dans ce contexte hautement inflammable, si le président de la République s’entête, il prendra le risque de provoquer l’étincelle qui déclenchera un incendie que personne ne pourra arrêter.

Force ouvrière a longtemps regardé avec méfiance les démarches intersyndicales. Qu’est-ce qui fait qu’aujourd’hui, vous vous y investissez au contraire ?

Nous avons acté lors de notre dernier congrès l’objectif de rechercher une intersyndicale la plus large possible pour pouvoir mobiliser le plus largement possible sur nos revendications. Cela veut dire, et tout le monde le fait, mettre de côté nos désaccords pour construire non pas un « syndicalisme rassemblé » sur tout, mais une union qui repose sur des revendications communes comme on l’a fait sur trois sujets depuis juin : le pouvoir d’achat, la réforme de l’assurance-chômage et la réforme des retraites.
 
Le gouvernement prépare un projet de loi sur l’immigration avec notamment un volet concernant les permis de travail. Quelle est la position de FO ?

Pour préserver la cohésion sociale, il faut s’attaquer aux causes qui la menacent et ces causes, ce n’est pas l’immigration. « Il n’y a qu’une seule race l’humanité. » Je fais mienne cette phrase de Jean Jaurès. Tous les travailleurs doivent avoir les mêmes droits et les mêmes conditions de travail et de salaire. C’est notre combat sur les salariés détachés. C’est aussi notre combat pour les travailleurs sans papiers.

Je pense par exemple aux salariés de la plateforme Just eat que nous soutenons pour obtenir leur régularisation et les sortir des griffes de ceux qui leur volent la majeure partie de leur salaire en échange de faux papiers. Concernant les titres de séjour spécifiques aux métiers en tension que le gouvernement veut développer, nous alertons sur le risque d’une main-d’oeuvre taillable et corvéable à merci.

Leïla de Comarmond

chaud ! chaud ! chaud !

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