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France 3 / 06 / 2015

Patrick Hébert, 23 ans à la tête de l’union départementale FO de Loire-Atlantique

EVELYNE SALAMERO

Patrick Hébert, après 23 ans à la tête de l’union départementale FO de Loire-Atlantique, reste celui qu’il a toujours été : un homme d’engagement

Il a un rire contagieux. Cet amoureux des fleurs et des belles chansons françaises raconte avec un plaisir évident ses « aventures », dont le début remonte à l’année de ses 13 ans, lorsqu’il fut élu président d’un club de jeunes, qu’il fit passer de 50 à 200 membres.

Patrick Hébert, « 65 ans et des brouettes », vient de laisser son mandat de secrétaire général de l’Union départementale FO de Loire-Atlantique, qu’il occupait avec passion depuis vingt-trois ans. Dans la joie et la bonne humeur. Bien connu pour ses talents de tribun, il en parle sans fausse modestie mais avec humour : « On me demande souvent comment je fais. Je n’en sais rien !

Tout ce que je sais, c’est que quand je descends de la tribune je suis vidé, comme après un combat de boxe… Même si je n’ai jamais fait de boxe ! » Et il éclate de rire.

En 68, il met son lycée et d’autres en grève

Au-delà de l’anecdote, l’épisode du club de jeunes donne déjà une idée bien précise de sa personnalité. « C’était un club monté par les catholiques. Le candidat officiel à la présidence voulait imposer un règlement très strict. Je me suis présenté sur la base de “ aucun règlement, liberté pour tous, chacun fait ce qu’il veut ”, autant vous dire que j’ai été élu triomphalement ! Mais j’étais totalement sincère, ce n’était pas du tout de la démagogie ! »

En 1968, encore lycéen, quand la grève générale démarre à Sud-Aviation il met son lycée en grève en quelques heures et organise des tournées dans les autres établissements de la ville…

Par la suite il sera président du syndicat étudiant, l’UNEF, à Nantes, où il étudie le droit, ainsi que de la mutuelle étudiante, la MNEF. Obligé de travailler comme surveillant dans un collège d’enseignement technique pour financer ses études, il se syndique au SNETAA, ce même syndicat autonome qui a récemment rejoint FO. « C’était mieux que l’UNEF. Là, il y avait des cas concrets à défendre. Il s’agissait des emplois et des salaires. »

C’est son premier contact direct avec le monde du travail. Enfin pas tout à fait puisque déjà quand il était lycéen, il travaillait comme déménageur avant d’aller en cours pour se payer un grand voyage. Un voyage qu’il fait à 16 ans, « à pas cher, c’est-à-dire à fond de cale et sans nourriture », jusqu’au Moyen-Orient, au Liban et en Syrie où il assiste à deux coups d’État.

Ce voyage, il en parle aujourd’hui comme d’un événement déterminant dans sa vie. Depuis, la dimension internationale des choses, en particulier celle de la lutte des classes, ne lui a plus jamais échappé. Autre événement déterminant pour lui : la lecture de « L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’État » d’Engels, qu’il pioche sur les étagères de son père. « Il n’y avait pas de sous à la maison pour avoir une grande bibliothèque. Mon père avait un copain relieur, alors il a fait relier une dizaine de livres. Je suis allé vers ceux-là, les plus beaux.

Il y avait Voltaire aussi… » Son père, c’est Alexandre Hébert, cheminot, anarcho-syndicaliste, grande figure du mouvement ouvrier et de FO, qui fut avant lui secrétaire de l’Union départementale FO de Loire-Atlantique. Sa mère est artiste peintre et travaille avec Fred Zeller.

Enfant, Patrick se nourrit donc avant tout, comme le reste de la famille, des légumes du potager, des œufs des deux cents poules que compte le poulailler, mais aussi de ses lectures, des discussions artistiques de sa mère et, de temps en temps, deux ou trois fois par an, de celles, politiques, syndicales, « voire philosophiques », entre son père et les amis de celui-ci en visite. « Le reste du temps, les préoccupations étaient très matérielles. »

Un grand attachement à la pratique contractuelle

Son intérêt pour la chose publique est donc précoce et son engagement politique tout autant. Après avoir fréquenté les groupes anarchistes, il rejoint le courant trotskyste alors qu’il est encore lycéen, s’en détourne pendant les événements de 68, puis y revient pour y rester jusqu’à aujourd’hui.

Il voulait être professeur d’histoire du droit. Ses adversaires politiques font barrage et ne le coopteront pas malgré une grève de soutien. Il passe alors avec succès le concours d’entrée à l’Assedic.

Au début il est juste syndiqué. Au bout d’un an il est élu secrétaire de la section FO, puis au conseil fédéral de la Fédération des Employés et Cadres. Quelques années plus tard il s’occupe de la protection sociale à l’union départementale. Il devient administrateur de la Sécurité sociale puis président de la CRAM pendant quinze ans.

« À l’époque, c’était du vrai paritarisme, on pouvait vraiment faire des choses », souligne-t-il, car ce fin négociateur attache une grande importance à la pratique contractuelle qui le passionne aussi. Il raconte avec enthousiasme la négociation de la convention collective de Pôle emploi, qui a permis à certains ex-agents de l’ANPE de gagner 1 000 euros de plus par mois, à contre- courant de l’austérité ambiante.

Il explique avec une fierté non dissimulée comment l’union départementale a réussi à maintenir, depuis le mandat de son père, la présence d’un de ses permanents dans les NAO (négociations annuelles obligatoires), alors que ce n’est pas une obligation légale.

Il se rappelle avec une certaine émotion sa première NAO, chez Manitou, lorsque pour la première fois il doit suppléer Alexandre Hébert, confronté à des problèmes de santé. « Il fallait passer la rampe ! » Il la passera plus d’une fois et sera élu secrétaire général en 1992, puis à la Commission exécutive confédérale en 1995 où il conserve son mandat aujourd’hui.

« La confrontation d’idées est indispensable pour avancer »

Il explique que « non, concilier engagements syndicaux et politiques n’a jamais été compliqué car il suffit d’appliquer la formule d’André Bergeron : FO n’est pas apolitique, mais indépendante des partis politiques ».

Quant à sa façon de dire les choses, franche, parfois tranchante, bien connue des membres du CCN de FO, il la revendique : « Si on a de l’estime pour les gens, de la considération, voire de l’affection, on leur doit de leur dire ce que l’on pense, comme on le pense. Au XIXe siècle, les polémiques étaient bien plus vives. Aujourd’hui, on commence par s’excuser de ne pas être d’accord. Pas moi. La confrontation d’idées est indispensable pour avancer.

Être “semouleux”, c’est être irrespectueux. S’engueuler et après aller arroser ça, ça c’est du respect. Et j’ai un grand respect pour les militants parce que le simple fait de s’engager mérite le respect. » Quand on lui demande « Et maintenant ? », il répond sereinement : « Je ne suis plus secrétaire général de l’union départementale. C’est au tour de Michel Le Roc’h.

Mais je poursuivrai mon engagement et mes autres mandats. Et j’ai bien d’autres passions dans la vie ! »… Comme cultiver son jardin. Au sens propre du terme, et au sens voltairien aussi.

chaud ! chaud ! chaud !

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