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économie 24 / 06 / 2019

Nationalisations-privatisations : histoire d’un rapport de force

Le flux et le reflux des nationalisations est le fruit du rapport de force entre d’un côté les travailleurs et leurs organisations  et de l’autre le patronat et les gouvernements.

Dans un monde essentiellement rural, jusqu’à la fin du XIXe siècle, les colères paysannes se traduisaient par des occupations de terres débouchant parfois sur des confiscations. La plupart du temps, les nobles et les grands propriétaires terriens, souvent les mêmes, reprenaient leurs biens par la force avec l’aide de la troupe ou comme dans le tiers-monde au moyen de milices ultra violentes qu’ils avaient mises sur pied.

Il existe plusieurs formes de nationalisations : confiscations, nationalisations sans indemnités, nationalisations avec rachats et compensations. Dans le sens inverse, les privatisations commencent souvent par des petits morceaux de l’entreprise publique : filiales ou minorité du capital. Mais quand le mouvement est enclenché, le privé devient vite boulimique, dévorant des pans entiers, parfois même des pans de Service public. Parfois, seul le rapport de force peut freiner cette avidité gravement dommageable pour les salariés comme pour les usagers. Pour le patronat le slogan de ces dernières décennies est devenu : « nationalisation des pertes, privatisation des profits ».

La France contemporaine a connu quatre grands mouvements de réappropriation. Il s’agit du terme le plus approprié dans ce cas de figure : 1789, 1936, 1945 et 1981. A l’été 1789, les choses sont rondement menées. Les paysans n’attendent pas les longs débats des parlementaires de la Constituante. Ils occupent les châteaux, les pillent, voire les démolissent et cultivent les terres des seigneurs à leur profit. Une fois installées, les instances étatiques révolutionnaires saisissent les biens du clergé en octobre 1789 et des nobles en mars 1792. Ce sont les « biens nationaux » rachetés par la bourgeoisie qui fera là de très bonnes affaires.

Les premières nationalisations modernes sont celles des réseaux téléphoniques naissant en 1889 et des mines de potasse d’Alsace en 1919. Paradoxalement, le Front populaire est assez timide dans ce domaine. Face à la puissance financière intacte du patronat, il ne privatise que les usines d’armement en août 1936 et les chemins de fer un an plus tard en créant la SNCF.

La vague de la libération

C’est De Gaulle, qui pourtant n’a rien d’un bolchevik, qui va lancer le plus grand mouvement de nationalisation en France, s’appuyant sur les décisions du programme du CNR. Ce dernier est on ne peut plus clair : L’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie. Pour le Général, il s’agit de punir durement les patrons collabos et assurer l’indépendance de la France face aux deux superpuissances émergentes.

Les Charbonnages de France en décembre 1944, Renault un mois plus tard, les compagnies aériennes en juin 1945, la Banque de France et les quatre plus grandes banques en décembre, puis en 1946 : le gaz, l’électricité et les onze plus grosses compagnies d’assurance. Pour les patrons ayant collaboré avec l’occupant, comme Louis Renault, l’État ne versera pas un centime d’indemnité.

La deuxième grande vague de nationalisation est fille de la victoire de la gauche en mai 1981. Mais cette fois le coût sera élevé : 39 milliards de francs. Mitterrand qui lui non plus n’a rien d’un bolchevik, lance la première vague en février 1982. Elle vise en priorité l’industrie (Thomson, Saint Gobain-Pont à Mousson, Rhône Poulenc, Péchiney-Ugine Kulmann, Sacilor, Usinor). Rapidement vient le tour de la finance (Paribas, CCF, Suez, CIC, Crédit du Nord, Rothschild, Worms…).

Mais au niveau international, le franc est attaqué à trois reprises entre juin 1981 et début 1983. Vient alors le tournant de « l’austérité ». Les privatisations ne touchent alors que les filiales des nouvellement nationalisés. Avec le retour de la droite au pouvoir en 1986 et 1993, les acquis de 1981 sont soldés : retour au privé de Saint Gobain, CCF, Paribas, Suez, Rhône Poulenc, Péchiney, Usinor-Sacilor. En 1997-98 vient le tour du CIC, Crédit du Nord et Thomson.

A noter qu’aujourd’hui la plupart de ces fleurons ont disparu, avalés, phagocytés et démembrés par des multinationales étrangères, laissant des dizaines de milliers de travailleurs sur le carreau.

Au début du XXIe siècle c’est le cœur des services publics qui devient la cible : France Télécom, GDF, une partie d’EDF, et Air France, ainsi que des « bijoux de familles » comme les autoroutes.

Depuis 2017, la curée continue de plus belle.

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