>Édito

16 / 11 / 2017

Le vertige du perchoir

Nous publions en guise d’éditorial l’intervention de Claire Compain, présidente de l’Union départementale des Retraités Force Ouvrière de Loire-Atlantique, au nom des organisations syndicales de retraités – à l’exception de la CFDT et de l’UNSA qui ont depuis longtemps fait voeux d’allégeance – à l’occasion de l’entretien accordé par le député François De Rugy, président de l’Assemblée Nationale, à ce titre quatrième personnage de l’État et soutien inconditionnel de la politique d’Emmanuel Macron.

Chacun peut deviner les réponses apportées à la délégation par François De Rugy, allant même jusqu’à justifi er les propos de la Ministre de la santé affirmant que « 30% des dépenses de l’Assurance maladie n’étaient pas pertinentes ». Une « orgie de richesses » pour les uns, la détresse pour la majorité, telle est la logique défendue par François De Rugy. Cette logique, celle des ordonnances et des régressions sociales, nous l’avons combattue à l’occasion de la journée de mobilisation interprofessionnelle du 16 novembre. La colère monte dans le pays. Poursuivre le chantier de démolition des conquêtes sociales, de la protection sociale et des garanties collectives avec à la clé l’abaissement du coût du travail ne peut conduire, tôt ou tard, qu’à l’explosion. Pour notre part, nous continuerons comme organisation syndicale à défendre les intérêts de la classe ouvrière contre ceux qui prétendent détruire ses droits.

« Comme vous le savez sans doute, malgré 4 courriers adressés par nos responsables nationaux, pour l’instant le Président de la République refuse de les recevoir. Or les retraités représentent presque le quart de la population (…). C’est de ce fait notre première question : acceptez- vous d’intercéder auprès de Monsieur Macron pour qu’il reçoive l’intersyndicale nationale des 9 organisations de retraités ?

Il y a urgence car de toute évidence, la situation des retraités est gravement mésestimée par le gouvernement. Dans le cadre de cette semaine de mobilisation nationale contre l’augmentation de la CSG de 1,7 point, ce qui représente une augmentation de 25% de son montant, nous avons été amenés à diffuser sur les marchés du département la lettre que nos organisations nationales ont envoyée au Président de la République. Nous voulons vous faire part des réactions de grande colère des retraités que nous avons rencontrés.

Je vous en citerai deux parmi les centaines de témoignages entendus : une dame nous a dit « l’augmentation de la CSG correspond pour moi à un plein de ma cuve de fuel. Comment je vais faire pour me chauffer » ? Un autre monsieur nous a dit « à quand une loi sur l’euthanasie pour supprimer les personnes âgées que le gouvernement fait mourir à petit feu. » Ce même monsieur nous a dit « j’ai commencé à travailler à 14 ans, et à l’époque c’était 48 heures par semaine, ma retraite je me la suis faite avec les cotisations que j’ai versées durant toute ma vie ».

Oui Monsieur le Député, les retraites en France ne sont pas des allocations versées par l’État, c’est un droit que chaque retraité s’est constitué durant toute sa vie professionnelle par ses cotisations. Et c’est notre seconde question, pensez-vous comme Monsieur Macron qui nous l’a écrit au cours de sa campagne électorale et qui l’a répété lors de son allocution télévisée, que les retraités qui ont un revenu fiscal de 1.197,91 euros (seuil de déclenchement de la CSG entière) sont des retraités aisés, c’est le terme qu’il a employé ?

Ne nous dites pas comme Monsieur Macron, que « dans une grande partie des cas la taxe d’habitation diminuée d’un tiers compensera 1,7 point de hausse.» Permettez-moi de citer à ce sujet le rapport de votre collègue, député de la République en marche Joël Giraud, auteur d’un rapport sur la CSG et les retraités : sur les 7 millions de retraités qui vont être touchés dès 2018 par l’augmentation de la CSG (…), 6,4 millions verraient leur revenu baissé sans compensation. Et 2,5 millions ne bénéficieront d’aucune compensation puisqu’ils ne bénéficieront d’aucune diminution de leur taxe d’habitation.

Et ne nous dites pas que ceux-là sont très riches puisque pour être concerné par la baisse de la taxe d’habitation il faut avoir un revenu fiscal inférieur à 27000 euros pour 1 personne seule et 43000 euros pour un couple c’est-à-dire par exemple un couple d’enseignants dont le Président de la République ose dire qu’ils « gagneront à travers la réforme de l’ISF ».

De qui se moque-t-on ?

Ne nous dites pas que c’est une mesure juste : France Info a pris une calculette en tenant compte de l’augmentation de la CSG, de la suppression partielle de la taxe d’habitation, de l’augmentation de la prime d’activité et du remplacement de l’ISF par l’ISI : un demandeur d’emploi à très faibles revenus va perdre 60 euros (il n’est pas touché par la hausse de la CSG ni par la baisse de la taxe d’habitation car il en est exonéré, par contre il perd l’APL ). Un retraité avec un revenu fiscal de 1 350 euros, va perdre, lui, 115 euros en tenant compte de la suppression partielle de sa taxe d’habitation, et un chef d’entreprise avec un salaire de 15 000 euros par mois, une maison d’une valeur de 1 million 500 000 euros et diverses actions et participations dans des entreprises pour

500 000 euros va, lui, gagner 3850 euros sur l’année puisqu’il payait 7 400 d’ISF et qu’il ne paiera plus que 3 900 d’ISI soit une ristourne de près de 50 %.

Oui, les choix actuels du gouvernement donnent de la politique actuelle une image particulièrement déséquilibrée : pendant que l’on augmente la CSG des retraités, pendant que l’on baisse les APL, que le forfait hospitalier augmente de 2 euros (…), que l’on supprime les emplois aidés, que l’on prive les collectivités territoriales de ressources leur permettant de développer des politiques sociales, on poursuit la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, on plafonne à 30% le taux d’imposition des revenus mobiliers, on exonère les portefeuilles boursiers de l’impôt sur la fortune. Voilà aussi ce qui scandalise les retraités de nos organisations comme celles et ceux que nous rencontrons sur les marchés, qui de plus entendent chaque soir de nouveaux scandales pour ne pas payer d’impôt en ouvrant des comptes dans les paradis fiscaux pour des milliards d’euros.

On ose nous dire que cette mesure c’est un « geste de solidarité envers les actifs en prenant en charge la baisse des cotisations d’assurance chômage et des cotisations maladie à leur endroit. »

Monsieur le Député, n’utilisez pas cet argument devant nous. Nous n’avons pas attendu le gouvernement actuel en matière de solidarité, nous qui sommes la première génération à devoir aider nos enfants et nos petits enfants confrontés à la précarité et au chômage du fait notamment des politiques menées depuis ces 30 dernières années et maintenant avec la baisse des APL et la remise en cause de l’Assurance chômage.

Beaucoup de retraités doivent aussi, souvent, aider leurs propres parents qui se heurtent à des restes à charge insupportables lorsqu’ils doivent rejoindre un établissement ou faire venir à domicile des professionnels pour pallier à leur dépendance. Non vraiment nous n’avons pas de leçon de solidarité à recevoir. (…) La CSG, vous le savez, est un impôt et l’impôt n’ouvre pas de droit. Le basculement du financement de la Sécurité sociale dans l’impôt signifierait la destruction de notre Sécurité sociale. Permettez-nous de vous rappeler que nos anciens ont voulu un système basé sur des cotisations pour précisément mettre la Sécurité sociale à l’abri des appétits des gouvernants et du capital financier : les cotisations collectées étant immédiatement reversées sous forme de prestations maladie, vieillesse, famille (…) ».

par Michel Le Roc’h,

secrétaire général de l’union départementale

CGT-Force Ouvrière de Loire-Atlantique

Ab OS

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