>Histoire

22 / 04 / 2020

« Il faut en finir avec le tout gratuit à l’hôpital ».

2004 : Vingt ans de contre-réformes ! L’hôpital public en danger. : 6ème partie.

Barbarie ordinaire : le gouvernement de 2020 décide : dans les Ehpad, « le principe est que la prise en charge des cas suspects et confirmés ne présentant pas de de critères de gravité doit être assurée en priorité au sein des Ehpad afin de ne pas saturer les établissements de santé ».

Autrement dit, quelques-uns décident de sacrifier des milliers (des dizaines de milliers) de citoyens privés des droits les plus élémentaires à l’accès aux soins … sur un critère d’âge.

Ce recul de civilisation vient de loin.

En 2004, Marc Blondel, secrétaire général de la CGT-FO tire un bilan de vingt ans (21 pour être un peu plus précis) d’application de contre-réformes. Quelques extraits de son discours :

Blondel commence par la canicule de 2003 :

« ( … ) Sur l’hôpital,

Non, mes chers camarades, les médecins et les infirmiers n’ont pas failli à leur mission pendant la canicule, mais ils ont été débordés ! Débordés par les suppressions de services et d’hôpitaux entiers découlant des restructurations – on devrait dire destruction – des différents plans hospitaliers. Débordés par la fermeture de lits en période estivale. Débordés par les postes vacants alors que des milliers d’emplois auraient dû être créés à la suite de la mise en place des 35h.

 Cela n’empêche pas le Ministre de la Santé (1) de penser à la  » gouvernance  » de l’institution hospitalière. Et là aussi, on nous promet de la méthode, de la concertation, des groupes de travail, etc.

Tout cela a un air de déjà vu, Mes Chers Camarades ! Car là aussi, les réformes envisagées sont dictées par des considérations économiques, celles qui sont liées à la baisse des déficits publics. C’est encore une fois la préoccupation majeure : respecter les contraintes économiques européennes du pacte de stabilité et de croissance.

Et le résultat, c’est que les gestionnaires des hôpitaux sont obligés de jongler avec les dépenses pour arriver à boucler les fins de mois ».

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Mais bien sûr, la canicule n’a « pas servi de leçon », bien au contraire. Les « casseurs » du service public ont expliqué qu’il fallait, d’urgence, accélérer le rythme des « réformes ».

Ici, Marc Blondel dénonce la « vétusté du parc hospitalier », puis :

« Et l’autre volet de la solution, ce sera de développer la tarification à l’activité, actuellement à l’essai dans une soixantaine d’hôpitaux.

On risque de voir s’établir une distinction entre les services rentables et ceux qui ne le sont pas.

Les premiers vont bien sûr attirer l’activité privée, mais qui voudra prendre en charge les plus coûteux ? Et parmi les plus coûteux, il n’y aurait pas, par hasard, ceux qui s’occupent des vieux ? 15 On ne peut pas aussi se demander si les gestionnaires ne vont pas être tentés de baisser les coûts en diminuant la qualité des soins ou en sélectionnant les malades les moins chers… ? Et, Mes Chers Camarades, pour couronner le tout une étude de l’OFCE -l’Observatoire Français de la Conjoncture Economique -estime que la tarification à l’activité pourrait entraîner la suppression de l’équivalent de 10 % des postes de la fonction publique hospitalière.

Ça veut dire 80 000 postes de moins ! Qu’est-ce qu’on veut, Mes Chers Camarades ? Que tout ce qui est rentable aille au privé et que le non rentable soit rejeté vers un hôpital public exsangue ? L’été 2003 a été dévastateur avec 10 000 morts, et sans doute beaucoup plus.

Mais les prochaines saisons, canicule ou pas, risquent d’être encore plus dévastatrices

Mais alors, pourquoi ouvrir la porte au privé toute grande, pourquoi autoriser la remise en cause des statuts et laisser les Agences Régionales d’Hospitalisation poursuivre imperturbablement les restructurations ?

 Dans ce gouvernement, il y a ce qu’on dit, et il y a ce qu’on fait ! Je veux également souligner quelque chose s’agissant des personnels, que ce soit à l’hôpital, dans les services publics, à la Sécurité Sociale.

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« L’intéressement », cette « dégueulasserie ! » (Alexandre Hébert, en mai 68).

« A chaque fois, on associe l’intéressement aux projets de réforme qui nous sont imposés.

On cherche à faire que les personnels de ces services participent eux-mêmes à la dislocation des services publics, de l’hôpital, de la Sécurité Sociale et, in fine, de leur propre statut ! Et puis, on cherche à faire pénétrer les méthodes du privé dans la gestion quotidienne de services qui n’ont pas de vocation à être commerciaux.

Dans la Sécurité Sociale, la CNAMTS a inventé un nouveau métier, celui de délégué de l’assurance maladie. Cela consisterait à aller démarcher les médecins, les professionnels de santé, pour les convaincre de signer des contrats de bonne pratique.

Les représentants de la Sécurité Sociale iraient démarcher les médecins pour leur demander de soigner moins, de dépenser moins, de prescrire moins. C’est un renversement complet de la nature de la relation de la Sécurité Sociale avec les malades,  Il ne s’agit plus de faciliter l’accès au droit, ce qui est la mission des employés de Sécurité Sociale. Il s’agit de mettre sur pied un service de régulation de la consommation médicale pour serrer la vis ! »

N’en déplaise aux charlatans qui, en tout  petit comité, prétendent maintenant décider du sort de dizaines de millions, la « catastrophe sanitaire » d’aujourd’hui ne tombe pas du ciel.

En octobre 2004 se réunit le 24ème congrès de la FEDERATION des SERVICES PUBLICS et des SERVICES de SANTE FORCE OUVRIERE.

Le rapport moral et d’activité détaille les propos de Blondel. Quelques brefs extraits :

« LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE :

Comment nier aujourd’hui que ces trois valeurs fondamentales risquent de disparaître des frontons de nos monuments publics ? » Le rapport dénonce « les contraintes par un pouvoir supra national sous la forme de l’Union européenne » et rappelle que : « l’article premier de la Constitution rendant la République décentralisée, va modifier radicalement la vie et présenter des risques gravissimes pour l’offre de services publics ».

La décentralisation devait être la « grande œuvre du second septennat de François Mitterrand. Le gouvernement Raffarin reprend le chantier. Le rapport indique :

« « En modifiant l’article 1 de la Constitution, en spécifiant sa nature décentralisée, le gouvernement de M. Raffarin « fait que : « la région deviendra l’échelon majeur de l’organisation des services publics et garante de la mise en cohérence des politiques décidées au niveau supérieur et applicables au niveau inférieur ». C’est l’application stricte de la doctrine corporatiste, « le principe de subsidiarité » cher aux diverses variantes de cléricaux.

« Chaque ligne, chaque mot, chaque discours et projet proposé par le gouvernement a comme but la disparition de la Fonction publique ».

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Le plan « hôpital 2007 » en est la meilleure illustration.

Le gouvernement s’oriente vers «  la création future de  l’hôpital entreprise ».

« Les dégâts imposés par la tarification à l’activité (faisant du soin une activité dont la recherche de rentabilité primera sur les conditions de son offre), et la création de pôles dotés de l’autonomie financière, permettant de voir se côtoyer dans un même lieu fournisseurs et prestataires, sont de très mauvais augure sur la qualité de l’offre en France.

En  cherchant à tout prix à rentabiliser les investissements, combien de patients se verront écartés, victimes d’une pathologie non rentable set/ou dépourvus des ressources nécessaires, dans l’incapacité de se doter d’un complément d’assurance indispensable à leur pris en charge ? »

Le rapport interroge :

« Que deviendront les petits et moyens établissements dans l’incapacité de supporter la concurrence ? ».

Alors que des pathologies telles que la tuberculose (2) ou le saturnisme réapparaissent, les choix gouvernementaux « modifient en profondeur la philosophie du soin  qui impose l’obligation de moyens et non celle du résultat ».  

Le congrès revient sur le combat pour la préservation des garanties statutaires des personnels, combat inséparable de celui pour la défense de l’hôpital.

A propos de l’escroquerie des 35 heures, le rapport du congrès indique :

« Dans la réalité, beaucoup d’agents et en particulier, ceux des secteurs administratifs, ouvriers techniciens et logistiques savent qu’il leur sera demandé de passer à 35 heures sans moyen humain supplémentaire mais uniquement pour des gains de productivité ! »  

Le syndicat des cadres hospitaliers FO, le CH FO.

Le syndicat dénonce  la sois disant « nouvelle gouvernance » qui entend faire du directeur d’hôpital « un bouc émissaire et un fusible idéal », et pointe les responsabilités : 

Ceux qui accompagnent, voire, élaborent les « réformes : « la CFDT, l’UNSA, la CGC …

Ceux qui refusent : FO, la CGT, DUD, la CFTC … » Pas de surprise.

Le CH FO conclut : 

« Un syndicat ne peut pas être une machine dont l’objectif est de plaire et de complaire aux pouvoirs publics » y compris ceux qui, aujourd’hui, en appellent à « bâtir la concorde » du « jour d’après » – selon une expression qui fait fureur dans certains milieux – dans la plus pure tradition vichyste.

Le plan « hôpital 2007 sera suivi d’autres plans visant comme toujours à … « sauver l’hôpital » ! Ce sera l’objet de la 7è partie.

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Novembre, décembre (2018) janvier, février … (2019) … le « dialogue social » …

(1) Il s’agit d’un certain Mattéï, ministre de la Santé, des Familles, et des handicapés de 2002 à 2004 ;  auteur de cette inoubliable sentence : « il faut en finir avec le tout gratuit à l’hôpital ». En pleine canicule, il s’illustre par son incompétence doublée d’un cynisme sans limite. Le jugeant sans doute trop dangereux, le gouvernement s’en débarrasse. Il est recasé à la CROIX ROUGE.

Les régimes autoritaires se débarrassent parfois – contraints ou pas – de quelques serviteurs trop stupides ou trop zélés. C’est le cas tout récemment de l’ex directeur de l’ARS Grand-Est qui a eu la bêtise (la franchise, diront certains) de « cracher le morceau » à propos de la suppression planifiée de centaines de postes et de lits à l’hôpital de Nancy. Légère erreur de timing.

(2) La tuberculose fait 1,5 millions de morts dans le monde chaque année, selon l’OMS.

JM 21-04-2020.

 

chaud ! chaud ! chaud !

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